Des astronomes de l’Université nationale autonome du Mexique ont peut-être résolu le mystère entourant les explosions de rayonnement gamma provenant de Sagittaire A* (Sgr A*), le trou noir supermassif situé au cœur de la Voie lactée. Les rayons gamma avaient en effet été détectés en 2021, mais leur origine précise demeurait encore inconnue.
Une observation inhabituelle
Sagittaire A* est situé au coeur de notre galaxie, la Voie lactée. Vous le retrouverez à une distance d’environ 26 700 années-lumière de la Terre dans la direction de la constellation du Sagittaire. Ce trou noir supermassif, qui tourne sur lui-même presque aussi vite que possible, a une masse équivalente à environ quatre millions de fois celle du Soleil.
Cet objet fascinant continue d’être une cible d’étude privilégiée pour les astronomes qui cherchent à comprendre les mécanismes complexes entourant les trous noirs supermassifs et leur interaction avec leur environnement galactique. La récente découverte d’émissions de rayons gamma périodiques provenant de la région de Sgr A* ajoute une nouvelle couche de mystère et d’excitation à notre compréhension de cet objet cosmique énigmatique.
Et pour cause, contrairement à l’image populaire des trous noirs qui aspirent tout sur leur passage, y compris la lumière, Sagittaire A* est également considéré comme « calme » par rapport à d’autres trous noirs supermassifs. L’objet évolue en effet dans un état relativement inactif, se nourrissant de matière à un rythme très lent par rapport à d’autres trous noirs similaires. Pour cette raison, les scientifiques sont restés un peu perplexes quant à la source de ces rayons gamma.
Une « goutte » de matière
Grâce aux données du télescope spatial Fermi Gamma-ray, des chercheurs ont finalement identifié une périodicité dans ces émissions. D’après l’équipe, elles se produisent environ toutes les 76,32 minutes, en harmonie avec les impulsions de rayonnement X observées à proximité. Pour expliquer ce phénomène, les chercheurs proposent une explication fascinante : les rayons gamma ne proviendraient pas directement de Sgr A* lui-même, mais plutôt d’une « goutte » de gaz tourbillonnant autour du trou noir à près d’un tiers de la vitesse de la lumière. Cette goutte de matière à grande vitesse émettrait donc périodiquement de la lumière sur différentes longueurs d’onde lors de son orbite autour de Sgr A*.
Comment expliquer la formation d’une telle structure ?
La formation d’une structure en forme de « goutte » de gaz tourbillonnant à proximité d’un trou noir supermassif comme Sgr A* est un processus complexe qui peut être influencé par plusieurs facteurs.
D’une part, rappelons que les trous noirs supermassifs sont souvent entourés par un disque d’accrétion formé de gaz et de poussière qui tombe progressivement vers le trou noir sous l’effet de la gravité. Ce disque d’accrétion peut être turbulent, avec des zones de compression et de raréfaction qui créent des conditions propices à la formation de structures localisées. D’autre part, la forte gravité du trou noir génère également des forces de marée qui déforment la matière qui s’approche trop près. Là encore, ces forces peuvent conduire à la formation de gouttes de matière à des distances spécifiques du trou noir, créant des zones où la matière s’accumule et tourbillonne.
Rappelons aussi que les champs magnétiques jouent un rôle crucial dans l’interaction entre le trou noir et la matière environnante. Ces derniers peuvent alors influencer la distribution de la matière et créer des zones de concentration qui donnent naissance à des structures particulières. Enfin, la présence d’autres étoiles, nuages de gaz ou objets massifs à proximité du trou noir peut perturber le mouvement de la matière et contribuer à la formation de structures particulières.
Pour l’heure, les chercheurs ne sont pas très sûrs du mécanisme responsable de cette fameuse goutte de matière accélérée à des vitesses relativistes. Malgré tout, cette découverte remet en question l’idée selon laquelle les rayons gamma des trous noirs supermassifs proviennent uniquement d’un disque d’accrétion turbulent généré par l’influence gravitationnelle du trou noir. Les résultats pourraient ainsi fournir des informations cruciales sur les environnements entourant les trous noirs supermassifs, en particulier ceux qui sont moins voraces comme Sgr A* au centre de la Voie lactée.
Cette découverte pourrait également permettre d’élucider le rôle des interactions entre le trou noir et les particules de matière environnantes dans la production de rayonnements de haute énergie. Les chercheurs estiment en effet que ces gouttes de matière pourraient entrer en collision les unes avec les autres, libérant ainsi des quantités importantes d’énergie sous forme de rayons gamma. Ces phénomènes offrent une rare opportunité d’observer en temps réel les processus de dynamisation de la matière dans des environnements extrêmes, et ainsi de mieux comprendre comment les trous noirs influencent l’évolution de leurs galaxies hôtes.