En réponse au réchauffement global, la position de la ceinture de pluies tropicales se modifie. Mais ce déplacement n’est pas homogène. Il varie selon les régions du globe ainsi que le détaille une nouvelle étude. Étant donné la dépendance structurelle de nombreux pays intertropicaux à ces pluies, tout changement menace la sécurité alimentaire de milliards de personnes. Des résultats publiés dans la revue Nature climate change ce 18 janvier.
La circulation atmosphérique est remarquablement structurée à grande échelle. Aussi, à chaque instant, une image satellitaire du globe révèle la présence d’une étroite bande orageuse à proximité de l’équateur. On parle de Zone de Convergence Inter-Tropicale (ZCIT). Par ailleurs, on identifie des régions bien plus calmes de part et d’autres – correspondant à la ceinture des grands déserts – et la présence de grands enroulements nuageux aux moyennes et hautes latitudes. Cette disposition résulte d’un équilibre très fin entre la force de pression liée au chauffage différentiel et l’effet Coriolis lié à la rotation du globe.
Si les contraintes mentionnées ci-dessus imposent à l’atmosphère une organisation préférentielle, elles permettent néanmoins aux facteurs externes de moduler un peu cette structuration. Par externes, on entend des éléments comme le volcanisme, l’activité solaire ou les rejets de gaz à effet de serre par les activités humaines. Pour rappel, ces derniers exercent un forçage sur le système climatique en limitant la quantité d’énergie quittant la Terre. En conséquence, la planète se réchauffe.
Un déplacement signifiant de la ceinture de pluies tropicales
Dans une nouvelle étude, des chercheurs détaillent la façon dont le réchauffement global affecte la position de la ZCIT. En particulier, ils montrent que l’effet est inégal selon la longitude considérée. Les précédents travaux s’étant souvent concentrés sur la moyenne par cercle de latitude, les particularités régionales n’étaient pas facilement identifiables. Des changements aux implications majeures puisqu’on sait que plusieurs milliards de personnes dépendent de ces pluies.
« Nos travaux montrent que le changement climatique entraînera un déplacement de la position de la ceinture de pluies tropicales dans des directions opposées au niveau de deux secteurs longitudinaux couvrant presque deux tiers du globe », relate Antonios Mamalakis, auteur principal du papier. « Un processus qui aura des effets en cascade sur la disponibilité de l’eau et la production alimentaire dans le monde ».
De fait, l’est de l’Afrique et l’océan Indien devraient connaître un déplacement vers le nord. À l’inverse, l’est du Pacifique et l’océan Atlantique devraient voir un déplacement vers le sud. Par conséquent, le sud-est de l’Afrique, Madagascar ainsi que l’Amérique centrale seraient promis à un climat plus sec. Au contraire, les pluies deviendraient plus fréquentes dans le sud de l’Asie et la péninsule arabique.
Réchauffement climatique et ZCIT : une approche novatrice
Ces résultats ont été obtenus grâce à l’analyse détaillée de 27 simulations climatiques à haute résolution. Et ce, dans un scénario où les rejets de gaz à effet de serre se poursuivent jusqu’en fin de siècle. Le point novateur de l’étude étant la séparation faite entre les hémisphères ouest et est. En particulier, une telle approche permet d’isoler les réponses différenciées des deux secteurs.
« En Asie, les réductions prévues des émissions d’aérosols, la fonte des glaciers dans l’Himalaya et la perte de la couverture de neige dans les régions du nord provoquées par le changement climatique entraîneront un réchauffement de l’atmosphère plus rapide que dans d’autres régions » explique James Randerson, co-auteur du papier. « Nous savons que la ceinture de pluie se déplace vers ce réchauffement, et que son mouvement vers le nord dans l’hémisphère oriental est cohérent avec les impacts attendus du changement climatique ». À l’inverse, dans l’hémisphère occidental, le refroidissement relatif présent au sud du Groenland induit un reflux de la ZCIT vers le sud.
« Cette étude combine l’approche d’ingénierie de la pensée systémique avec l’analyse des données et la science du climat afin de révéler des manifestations subtiles, auparavant méconnues, du réchauffement climatique sur la dynamique des précipitations », ajoute-t-il.