Le lac Sarez, surnommé la « Perle bleue », fascine par la splendeur de ses eaux turquoises mais suscite également la crainte pour des millions d’habitants de la région. Né d’une tragédie en 1911 suite à un séisme dévastateur, ce lac formé par un barrage naturel pose aujourd’hui des menaces sérieuses en raison de son instabilité. À quel point cette menace est-elle justifiée ?
Son histoire a commencé par une tragédie une nuit d’hiver en 1911 quand le plus fort séisme connu des montagnes du Pamir occidental a eu lieu. Le tremblement de terre d’une magnitude de 7,4 a entraîné un immense glissement de terrain qui a détourné la rivière Murghab et enterré le village d’Usoj. En mémoire des victimes, ce barrage naturel de 567 mètres de haut et 5 kilomètres de long a été appelé Usoj. La cuvette située en amont du barrage fut rapidement inondée, engloutissant plusieurs village dont celui qui donnera son nom au lac.
Désormais, le volume d’eau du plus jeune lac de Pamir (70 km de longueur, 505 mètres profondeur) atteint près de 17 milliards de mètres cubes et son niveau ne cesse d’augmenter, fragilisant progressivement l’immense barrage naturel. Cela fait de Sarez le plus grand lac montagneux au monde. Mais cette énorme quantité d’eau pourrait un jour se transformer en un vrai monstre…
Le lac lui-même et ses environs sont déclarés interdits d’accès depuis plus d’un siècle. Il est difficile de l’atteindre et pour les touristes qui souhaitent profiter de la beauté du « dragon endormi », il faut obtenir un laissez-passer spécial.
Depuis des années, les scientifiques signalent que ce lac est instable. Les récents tremblements de terre en Afghanistan qui ont fait entre 3000 à 5000 morts n’ont fait que renforcer leur inquiétude. Le Tadjikistan, un pays montagneux de 8 millions d’habitants dont l’économie a été ruinée par la guerre civile et des catastrophes naturelles ne peut malheureusement pas résoudre ce problème seul et a besoin de l’aide des pays voisins.
Une autre menace a été découverte en 1967. Sur la rive droite du lac, les géologues ont remarqué des fissures atteignant jusqu’à deux kilomètres de longueur. Leur enquête a révélé qu’il existait un risque qu’un nouveau glissement de terrain géant puisse tomber dans le lac, il formerait alors une onde qui ferait probablement céder le barrage naturel.
La zone potentiellement sinistrée regroupe plusieurs pays, le Tadjikistan, le Turkménistan, l’Ouzbékistan et l’Afghanistan. Selon le Comité pour les situations d’urgence de la République du Tadjikistan, cette zone qui pourrait se retrouver inondée compte une population d’environ six millions de personnes.
Dans la vallée, tout le monde est au courant du danger qui rôde au sommet, mais personne ne peut rien y faire. Les habitants de l’ancien village de Sarez avaient été réinstallés ailleurs avant que les eaux de l’inondation ne les atteignent. Mais ce territoire montagneux très escarpé ne peut pas abriter les milliers de paysans qu’il faudrait évacuer de la vallée en aval du lac.
Les autorités ont tenté de mettre en place des systèmes de surveillance qui permettront de lancer l’alerte en cas de rupture du barrage. Un poste d’observation permanent a été installé près du barrage et des capteurs permettent de surveiller les changements soudains du niveau de l’eau.
Malgré les efforts de surveillance et les dispositifs d’alerte, les risques liés au lac Sarez demeurent très réels et préoccupent les experts de la région. En cas de rupture soudaine du barrage naturel, les populations en aval ne disposeraient que de quelques heures pour évacuer, rendant toute opération de sauvetage extrêmement difficile. Le manque d’infrastructures et les accès limités dans cette région isolée ne font qu’aggraver la situation, mettant en lumière l’urgence de la coopération internationale pour prévenir une catastrophe humanitaire de grande ampleur.
Source: Lenta