L’acidification des océans abîme la peau des requins

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Crédits : bluegroper/pixabay

Une étude menée en Afrique du Sud révèle que l’acidification des océans peut endommager la peau des requins, affectant leur incroyable hydrodynamisme.

Environ 30% du CO2 lié aux activités humaines est absorbé par les eaux chaque année. Ce gaz se dissout ensuite pour former de l’acide carbonique, ce qui a pour effet de modifier l’équilibre chimique de l’eau de mer. Les océans deviennent alors plus acides, ce qui entrave le développement de certaines espèces marines, comme les requins.

Les denticules sensibles à la chimie océanique

Les requins sont des poissons très rapides. Le mako, par exemple, est capable d’atteindre une vitesse de pointe de 100 km/h. Cette vélocité, ils la doivent à leur peau recouverte de denticules – sortes de petites écailles – resserrés et recourbés vers l’arrière. Le problème c’est qu’une exposition constante à un pH bas semble fragiliser ces structures, selon une étude publiée dans la revue Scientific Reports.

Pour ces travaux des chercheurs allemands et sud-africains se sont concentrés sur un requin en particulier : Haploblepharus edwardsii. « Cette espèce est petite, facile à élever et à manipuler, et elle n’est pas menacée », explique Luntz Auerswald, de l’Université de Stellenbosch en Afrique du Sud.

Les chercheurs ont placé trois de ces requins dans un bassin rempli d’eau de mer acide durant neuf semaines. Ils ont alors constaté que 25% de leurs denticules cutanés avaient été endommagés. Dans un groupe de contrôle évoluant dans une eau au pH plus équilibré, seuls 9,2% des denticules ont été endommagés.

Ainsi les chercheurs concluent qu’une exposition prolongée à de l’eau de mer acide peut corroder les denticules, au moins chez cette espèce. Une peau aussi abîmée réduit forcément les capacités de nage de ces poissons, qui pourraient de ce fait avoir beaucoup plus de mal à attraper des proies pour se nourrir.

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Haploblepharus edwardsii. Crédits : Seascapeza/Wikipédia

L’ensemble du système océanique est concerné

Ce phénomène, qui aura tendance à s’aggraver avec le réchauffement climatique, pourrait également toucher toutes les autres espèces de requins, notent les chercheurs, et plus encore :

« Cette étude nous montre le cas typique d’un animal marin menacé par l’acidification des océans, explique Jean-Luc Solandt, de la Marine Conservation Society, au Royaume-Uni. Mais plus largement, ce phénomène est susceptible d’avoir un impact important sur les processus du système océanique menant à des mers moins productives. Si cela se produit sur la peau d’un requin, pensez à l’impact massif sur le plancton, qui est à la base du réseau alimentaire et un agent absorbant massif de CO2 ».

Les chercheurs notent également qu’un niveau similaire de corrosion pourrait endommager les dents des requins.

Il faut tout de même souligner que cette étude n’a porté que sur un nombre assez restreint d’individus. D’autres études seront bien évidemment nécessaires pour évaluer le réel impact de cette modification de l’équilibre chimique de l’eau de mer sur les espèces. Ces travaux sont déjà en cours. Les chercheurs prévoient d’étendre leurs recherches aux langoustes et aux oursins dès l’année prochaine.

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