L’absorption de CO2 près de la péninsule antarctique a été multipliée par 5 depuis 1993

Antarctique
Crédits : Max Pixel.

Des scientifiques de l’université Rutgers (États-Unis) ont découvert que l’absorption de CO2 par l’océan avait fortement augmenté sur les 25 dernières années à l’ouest de la péninsule antarctique. Les résultats ont été publiés dans la revue scientifique Nature climate change ce 26 août. 

Environ un quart du dioxyde de carbone (CO2) émis par les activités humaines est absorbé par l’océan – ce qui provoque son acidification. Près de la moitié de l’absorption a lieu dans l’océan austral – gigantesque masse d’eau entourant le continent antarctique.

Néanmoins, l’intensité de cette pompe à carbone n’est pas figée dans le temps. De fait, la perspective grandissante d’un affaiblissement futur laisse craindre une accélération du réchauffement climatique. En effet, dans ce cas le CO2 s’accumulerait plus facilement dans l’atmosphère.

Aussi, il est important de comprendre comment l’absorption a évolué dans le passé récent et les facteurs responsables des fluctuations observées. L’anticipation des changements futurs n’en sera rendue que plus précise et robuste. Des prérequis nécessaires pour une bonne adaptation.

CO2 : une capture régionale 5 fois plus active en été

Selon de nouveaux résultats, la quantité de CO2 absorbée à l’ouest de la péninsule antarctique a été multipliée par 5 entre 1993 et 2017. Le choix de la zone n’est pas anodin car, près du continent, la production biologique est importante entre le printemps et l’été ce qui renforce les flux de carbone. Seule la saison chaude est analysée ici – entre décembre et février dans l’hémisphère sud.

antarctique CO2
Localisation de la zone d’étude (rectangle en noir). Crédits : Michael S. Brown & al. 2019.

Les scientifiques expliquent que la tendance mesurée trouve son origine dans une modification de stabilité de la couche océanique supérieure. Plus elle est stable – i.e. stratifiée -, plus la productivité et la diversité planctonique sont importantes. Résultat : la pompe biologique à CO2 est plus active. Or, sur les 25 ans couverts par l’étude, la stabilité a justement augmenté.

Fonte des glaces : un océan temporairement plus stratifié

Le secteur de l’océan austral situé à l’ouest de la péninsule a subi des changements majeurs durant les dernières décennies. En particulier, une hausse de la température de plusieurs degrés, un recul généralisé des glaciers côtiers et une modification de la dynamique de la glace de mer. Cette évolution s’est concrétisée par une hausse de l’apport en eau de fonte – moins salée. Cette eau moins dense reste en surface car elle se mélange mal avec celle plus dense du dessous. En conséquence, la stratification s’est accentuée.

Via leur influence sur la glace de mer, les changements du climat régional ont ainsi induit une augmentation de la capture océanique en CO2. Notamment dans la partie sud de la zone d’étude, là où les changements ont été les plus récents.

Tendance de la capture océanique en CO2 entre 1993 et 2017 dans la zone d’étude. Crédits : Michael S. Brown & al. 2019.

Cependant, il ne s’agirait là que d’un processus transitoire. En effet, à mesure que le réchauffement se poursuivra, la quantité de glace se réduira et donc l’apport en eau douce aussi. L’océan deviendra moins stratifié et la production biologique risque de diminuer. Il est probable qu’à terme, ceci entraîne une baisse du flux de CO2 de l’atmosphère à l’océan. Un scénario qui commencerait à se dessiner vers la pointe nord de la péninsule antarctique.

Enfin, « ces résultats fournissent un cadre de travail permettant de comprendre comment l’absorption de CO2 par les océans peut être modifiée dans d’autres régions côtières de l’antarctique avec le changement climatique » peut-on lire dans l’abstract du papier.

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