De nouvelles mesures effectuées dans l’Himalaya alertent sur les rejets de polluants liés à la fonte des glaciers. Précédemment accumulés et stockés dans la glace, ceux-ci sont actuellement remis en circulation. Or, ils induisent une contamination de l’écosystème local sur lequel la population humaine se base pour s’alimenter par exemple. Cette tendance devrait s’accentuer à l’avenir et doit donc être prise au sérieux.
Au cours des dernières dizaines d’années, près de 80 % des glaciers du plateau tibétain ont accusé un recul. Cette évolution est à mettre en lien avec la hausse généralisée des températures qui affecte notre planète. Par ailleurs, l’eau déstockée durant le processus de fonte a favorisé l’extension d’environ 50% des lacs présents sur le plateau.
Outre les conséquences sur l’approvisionnement en eau pour la population en aval et l’écosystème local, ce dégel libère une importante quantité de polluants. C’est en tout cas ce qui a été démontré dans une nouvelle étude parue dans la revue scientifique Journal of Geophysical Research: Atmospheres. Les résultats ont été rendus publics le 18 juin dernier.
Pollution aux agents fluorés : le cas du bassin Nam Co
Plus précisément, les chercheurs ont analysé des échantillons de glace, d’eau et de neige dans une zone particulière de l’Himalaya – le bassin Nam Co situé vers le centre du plateau tibétain. Cette zone comportait près de 300 glaciers en 2010. Entre 1999 et 2015, la région a perdu 20 % de son volume de glace.
Pour évaluer l’importance des rejets de polluants, les scientifiques ont mesuré une classe de composés chimiques appelés acides perfluoroalkylés. Ces composés fluorés sont essentiellement utilisés dans l’industrie des pesticides et des engrais. Aussi, les résultats indiquent que la fonte des glaciers du bassin en exporte chaque année 1,8 kg vers le lac Nam Co.
« Globalement, les résultats sont comparables aux études précédentes, faites sur les lacs des régions polaires », lit-on dans le document.
« Les glaciers de l’Himalaya contiennent des niveaux de polluants atmosphériques encore plus élevés que les glaciers d’autres régions du monde, ceci en raison de leur proximité avec les pays de l’Asie du Sud qui comptent parmi les régions les plus polluées du monde », explique Xiaoping Wang, géochimiste et co-auteur de la présente étude.
Un écosystème de plus en plus contaminé
Ainsi, les polluants rejetés par les activités humaines – l’agriculture notamment – et stockés dans les glaces depuis les années 1940 se voient brutalement remis en circulation par une fonte accélérée en ce début de 21e siècle. Une fois libérés dans l’environnement, ces acides ont une très longue durée de vie.
Évidemment, les conséquences pour l’écosystème en aval sont significatives. Il existe même un danger pour la santé humaine puisque les espèces vivant dans le lac ou les cours d’eau à proximité sont contaminées par ces composés fluorés. En conséquence, manger du poisson capturé près du lac n’est de toute évidence pas recommandé. La toxicité peut en effet être importante.
À terme, les polluants diffusent dans toute la chaîne alimentaire. En outre, la situation ne risque pas de s’améliorer avec la poursuite du réchauffement. « Cette eau, celle du bassin Nam Co, fournit directement l’Inde en ressources hydriques » rajoute Kimberley Miner, une géochimiste n’ayant pas participé à l’étude. « La Terre est un système fermé. Tout ce qui a été libéré sur Terre reste quelque part sur Terre ». Cet état de fait justifie que le problème soit pris au sérieux.
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