La plus grande mer de Titan pourrait atteindre une profondeur de 300 mètres

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Un rendu artistique de Kraken Mare, la grande mer de méthane liquide sur la lune de Saturne Titan. CréditS : NASA / John Glenn Research Center

Kraken Mare, une mer de méthane liquide retrouvée sur Titan (la lune de Saturne), aurait une profondeur d’au moins cent mètres au niveau du centre, selon une analyse des données recueillies par la sonde Cassini en 2014.

Avec une largeur de 5150 kilomètres, Titan est la deuxième plus grande lune du Système solaire, juste derrière Ganymède. Hormis notre planète, il s’agit du seul corps du Système solaire qui présente des liquides stables en surface. À un milliard de kilomètres de la Terre, sous son épaisse enveloppe dorée composée majoritairement d’azote gazeux, se dessine en effet un paysage d’apparence quasi terrestre avec des rivières, des lacs et des mers de méthane et d’éthane sous forme liquide.

Présente dans le système de Saturne entre 2004 et 2017, la mission Cassini avait permis d’estimer la profondeur et la composition de chacune des mers de Titan, à l’exception de Kraken Mare, la plus grande qui contient environ 80% des liquides de surface de la lune. C’est désormais chose faite, du moins indirectement.

Au moins cent mètres de profondeur

Dans le cadre d’une étude récente, des chercheurs de l’Université Cornell ont passé au crible les données de l’un des derniers survols (T104) de Titan par la mission Cassini, opéré le 21 août 2014. La sonde était s’était alors placée à un peu plus de 900 km au-dessus de la surface de Titan, filant à près de 20 000km/h.

Pendant ce survol, Cassini avait déployé son altimètre radar pour mesurer la profondeur du liquide (bathymétrie) à Kraken Mare et Moray Sinus, un estuaire situé à l’extrémité nord de la grande mer. Pour les chercheurs, l’idée consistait en gros à noter les différences de temps de retour du radar entre la surface liquide et le fond de la mer. On a également pu estimer sa composition en soulignant la quantité d’énergie radar absorbée pendant le transit à travers le liquide.

Ces travaux ont permis d’estimer la profondeur de Moray Sinus : environ 85 mètres. D’après l’absorption des ondes radar, cet estuaire serait composé à 70% de méthane, 16% d’azote et 14% d’éthane.

L’analyse des données altimétriques dans le corps principal de Kraken Mare, en revanche, n’a montré aucune preuve de retour de signaux depuis le fond marin, suggérant que le liquide est soit trop profond soit trop absorbant pour que les ondes radio de Cassini puissent pénétrer. Cependant, si l’on part du principe que composition de Kraken Mare est similaire à celle de Moray Sinus, comme on peut s’y attendre, les chercheurs ont estimé que sa profondeur pouvait atteindre les trois-cent mètres en son centre.

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Cette mosaïque colorisée de la mission Cassini montre une vue complète sur les lacs et mers du nord de Titan. Crédits : NASA

Un sous-marin sur Titan

Il y aurait donc bien assez de place pour qu’un sous-marin robotique potentiel puisse explorer cette gigantesque mer, aussi grande que les cinq Grands Lacs réunis (environ 400 000 kilomètres carrés). D’ailleurs, ça tombe bien : des chercheurs travaillent actuellement au développement d’un projet en ce sens. Si elle est approuvée par la NASA, une telle mission pourrait être lancée dans les années 2030 avec une arrivée prévue dans les années 2040.

Parmi les équipements scientifiques possiblement embarqués, les chercheurs évoquent des instruments capables d’analyser la chimie des hydrocarbures, un imageur de surface, un sondeur de profondeur et une station météo. Des instruments supplémentaires pourraient également analyser des échantillons de fond marin.

Une mission de ce type pourrait alors nous en apprendre davantage sur cette incroyable lune qui, selon de nombreux astrobiologistes, pourrait abriter la vie. Si tant est qu’elle existe, celle-ci serait en revanche très différente de celle évoluant sur Terre.