Il y a quelques jours, les équipes de la NASA partageaient la première image en couleur du James Webb Telescope (JWT), nous révélant une région du cosmos incroyablement lointaine. Si vous avez vu cette photo, vous avez probablement entendu le terme « lentille gravitationnelle ». Mais de quoi parle-t-on exactement ? Et comment cet effet peut-il aider ce nouveau télescope à faire des découvertes ?
Prise par le James Webb Telescope, l’image la plus profonde du cosmos jamais capturée nous montre plusieurs choses. D’une part, vous remarquerez quelques points de lumières à six pointes. Il s’agit d’étoiles de la Voie lactée présentes dans le champ de vision de l’observatoire. L’image nous montre également un amas de galaxies situé à un peu plus de quatre milliards d’années-lumière avec la galaxie centrale de cet amas (une tache jaune blanchâtre) au centre. Enfin, vous remarquerez que plusieurs galaxies semblent étirées. Il ne s’agit pas d’un artefact du télescope, mais bien d’une distorsion de la réalité elle-même.
Lentille gravitationnelle
Trois premiers points sont à retenir. D’une part, la gravité est liée à la masse, quoi qu’il arrive. D’autre part, plus un objet a de masse, plus son influence gravitationnelle est forte. Enfin, la gravité déforme le tissu même de l’espace-temps.
Prenons maintenant l’exemple d’une collection de galaxies massives proches les unes des autres : un amas de galaxies. Étant donné que la masse collective de cet objet est très importante, cela va créer une courbure dans le tissu de l’espace-temps. Un effet similaire peut être observé sur un matelas lorsque vous mettez une boule de pétanque dessus.
Ainsi, puisque le tissu est déformé, lorsque la lumière d’une galaxie en arrière-plan traverse cette zone, le chemin qu’elle parcourt devient incurvé. C’est pourquoi les images de ces galaxies en arrière-plan paraissent allongées : leur lumière est étirée. Ce phénomène est connu sous le nom de lentille gravitationnelle et ses effets sont clairement visibles dans cette première image du JWT.
Loupe cosmique
Une autre caractéristique clé est que les lentilles gravitationnelles ne se contentent pas de déformer la lumière, elles l’amplifient également. Autrement dit, cet effet permet de visualiser des galaxies en arrière-plan qui autrement auraient été invisibles, leur lumière étant trop faible.
Ici, les astronomes ont donc utilisé l’amas de galaxies comme une sorte de loupe cosmique. Son énorme champ de gravitation (environ 700 fois la masse de la galaxie d’Andromède) a donc permis de déformer, mais aussi d’amplifier la lumière de galaxies plus éloignées. Si l’amas se place à environ 4,6 milliards d’années-lumière, certaines des galaxies visibles grâce à l’effet de lentille gravitationnelle sont ici visibles à plus de treize milliards d’années-lumière.
Le James Webb Telescope est particulièrement bien adapté pour tirer parti de ce phénomène. D’une part, son énorme miroir primaire permet de collecter un maximum de lumière et des images plus nettes que ses prédécesseurs. D’autre part, le JWT travaille aux longueurs d’onde infrarouges. Or, nous savons que les objets les plus éloignés de l’Univers voient leur lumière décalée vers les infrarouges du spectre électromagnétique.
Au cours de ces prochaines années, la puissance sans précédent du James Webb Telescope combinée aux effets de lentille gravitationnelle pourra permettre aux astronomes de sonder l’Univers tel qu’il était dans les toutes premières années après le Big Bang.