Le télescope spatial James Webb (JWST) a permis une avancée majeure dans l’étude des exoplanètes en photographiant l’un des mondes les plus froids jamais observés en dehors de notre système solaire.
Une orbite elliptique et des caractéristiques physiques uniques
Des astronomes ont récemment utilisé le télescope spatial James Webb (JWST) pour photographier directement une exoplanète dénommée Eps Ind Ab située dans le système stellaire triple Epsilon Indi, à environ 12 années-lumière de la Terre. Eps Ind Ab complète un tour de son étoile mère, une naine rouge appelée Eps Ind A, tous les 200 années terrestres. Cette orbite est particulièrement elliptique, ce qui signifie que la distance entre la planète et son étoile varie considérablement. À son point le plus proche, Eps Ind Ab est à environ 20 fois la distance entre la Terre et le Soleil, tandis qu’à son point le plus éloigné, elle se trouve à 50 fois cette distance.
Des analyses ont également révélé que cette planète avait une température d’environ 0°C. Il s’agit du monde le plus froid jamais étudié par James Webb. Cette température s’explique en grande partie par la distance qui sépare la planète de son étoile. Le fait que l’étoile Eps Ind A soit une naine orange plus petite et plus froide que le Soleil joue également.
Enfin notez qu’il s’agit de la première exoplanète photographiée directement par le télescope James Webb. Cette découverte marque une étape importante dans l’étude des exoplanètes froides et des géantes gazeuses éloignées.
Une technique d’imagerie innovante
La photographie directe d’Eps Ind Ab, qui est six fois plus massive que Jupiter, a été rendue possible grâce à l’utilisation d’un coronographe intégré à l’instrument MIRI du JWST. Il agit essentiellement comme un bouclier qui bloque la lumière intense de l’étoile, permettant ainsi de visualiser les objets moins lumineux situés à proximité, tels que les exoplanètes. Cette technique est particulièrement efficace pour observer des objets froids et distants qui émettent principalement dans le spectre infrarouge moyen.
Les premières images prises par l’instrument MIRI ont montré un point lumineux qui ne correspondait pas à la position attendue de la planète. En analysant ces nouvelles données, les chercheurs ont réalisé que les estimations précédentes de la masse et de l’orbite de la planète étaient incorrectes. Les méthodes antérieures, comme celle de la vitesse radiale, avaient en effet mal évalué ces paramètres. Cette technique détecte les variations dans le mouvement d’une étoile causées par l’attraction gravitationnelle d’une planète, mais elle est moins précise pour les planètes avec des orbites très larges, comme Eps Ind Ab.
Implications pour l’étude des exoplanètes
La découverte d’Eps Ind Ab est particulièrement significative, car elle démontre les capacités du JWST à détecter et étudier des exoplanètes qui étaient auparavant hors de portée des instruments terrestres. L’équipe de chercheurs, dirigée par Elisabeth Matthews de l’Institut Max Planck d’astronomie à Heidelberg, a également entrepris d’analyser l’atmosphère de la planète à l’aide des données infrarouges de MIRI. Les premiers résultats suggèrent une atmosphère riche en éléments lourds, notamment en carbone, formant des molécules telles que le méthane, le dioxyde et le monoxyde de carbone.
Il est également possible que l’atmosphère de la planète soit nuageuse, ce qui pourrait influencer la composition chimique détectée. Des recherches supplémentaires sont nécessaires pour mieux comprendre ces aspects et obtenir une vue d’ensemble plus précise de la composition chimique et du climat de cette « super-Jupiter ».
De manière générale, les découvertes réalisées avec Eps Ind Ab ouvrent la voie à des études plus approfondies sur les géantes gazeuses froides et leur système. L’équipe de chercheurs prévoit d’obtenir des spectres de lumière de cette exoplanète pour fournir une « empreinte digitale » détaillée de sa composition chimique et de son climat. À plus long terme, ils espèrent observer d’autres systèmes planétaires proches pour identifier d’autres géantes gazeuses froides qui auraient échappé à la détection.
Les détails de l’étude sont publiés dans la revue .