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Malgré les nombreuses menaces qui pèsent sur eux, les homards arboricoles persistent encore. Crédits : Granitethighs via Wikimedia Commons

L’insecte le plus rare du monde vit sur le plus haut éperon rocheux de la planète

Au large des côtes de l’Australie, sur un éperon rocheux perdu au milieu de l’océan Pacifique, vit un être fascinant d’une rareté inégalée : le homard arboricole (Dryococelus australis). Longtemps considéré comme éteint, cet insecte extraordinaire a réécrit les livres d’histoire naturelle lorsqu’il fut redécouvert dans les années 2000 sur la Pyramide de Ball, le plus haut éperon rocheux de la planète. Ce sanctuaire isolé, battu par les vents et à peine habitable, raconte une histoire de survie exceptionnelle face à l’extinction.

Un géant méconnu : le homard arboricole

Dryococelus australis, également appelé phasme de l’île Lord Howe, est un insecte unique en son genre. Mesurant entre 15 et 20 centimètres de long, avec un corps noir brillant et des pattes imposantes, il ressemble à une créature préhistorique. Ce « homard terrestre », comme il est parfois surnommé, est nocturne et incapable de voler, préférant grimper aux arbustes pour se cacher durant la journée.

Autrefois, cette espèce ne vivait que sur l’île Lord Howe, une petite île volcanique située entre l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Cependant, l’écosystème fragile de l’île a été gravement perturbé en 1918 lorsqu’un navire naufragé introduisit des rats noirs. Ces prédateurs ont rapidement ravagé les populations de faune locale, y compris les homards arboricoles, qui furent déclarés éteints dès 1920.

Toutefois, leur histoire était loin d’être terminée. Dans les années 1960, des grimpeurs explorant la Pyramide de Ball, un affleurement volcanique abrupt à 23 kilomètres de Lord Howe, rapportèrent des indices étranges : des excréments et des peaux d’insectes évoquant une possible survie de l’espèce.

La redécouverte sur la Pyramide de Ball

La Pyramide de Ball est un lieu aussi fascinant qu’inaccessible. Cet éperon rocheux, le plus haut de la planète, s’élève à plus de 560 mètres au-dessus de l’océan, offrant un habitat minimaliste à une faune unique. En 2001, une expédition scientifique entreprit d’éclaircir le mystère des homards arboricoles. Les chercheurs y découvrirent quelques individus vivants perchés sur un arbuste de thé Melaleuca, à 64 mètres au-dessus du niveau de la mer.

Cette découverte était extraordinaire. Les individus étaient différents de leurs ancêtres supposément disparus. Ils présentaient en effet des pattes plus petites et une teinte plus sombre. Après des analyses ADN, il fut confirmé que ces insectes étaient bien des homards arboricoles, survivants improbables de l’extinction grâce à l’isolement extrême de la Pyramide de Ball.

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Sur cet éperon rocheux vit l’insecte le plus rare du monde. Crédits : PotMart186/Via Wikipédia

Un programme de sauvetage audacieux

Pour préserver l’espèce, un programme d’élevage en captivité fut lancé en 2003. Quatre insectes furent recueillis, dont un couple surnommé Adam et Ève. Transportés au zoo de Melbourne, ces survivants devinrent les fondateurs d’une population élevée en captivité. Grâce à des soins attentifs, près de 19 000 spécimens ont éclos dans ces conditions jusqu’en 2022.

Cette réussite inspira d’autres institutions, notamment le zoo de San Diego qui participa également à l’effort de sauvegarde. En 2023, des visiteurs purent observer cette espèce extraordinaire dans un habitat spécialement aménagé, ce qui a contribué à sensibiliser le public à la conservation des espèces en danger.

Malgré ces progrès, le homard arboricole demeure en danger critique d’extinction. Seuls 9 à 35 individus subsisteraient à l’état sauvage, confinés à un seul arbuste sur la Pyramide de Ball. Leur survie est menacée par des tempêtes violentes, des sécheresses et la concurrence des plantes invasives. De plus, leur habitat déjà restreint rend leur population extrêmement vulnérable.

Cependant, il existe une lueur d’espoir. Les efforts pour éradiquer les rats de l’île Lord Howe ont en effet porté leurs fruits et aucun rongeur n’a été observé depuis 2023. Cela ouvre donc la voie à une éventuelle réintroduction des homards arboricoles sur leur habitat d’origine, ce qui constituerait une étape importante dans leur réhabilitation.

Brice Louvet

Rédigé par Brice Louvet

Brice est un journaliste passionné de sciences. Ses domaines favoris : l'espace et la paléontologie. Il collabore avec Sciencepost depuis près d'une décennie, partageant avec vous les nouvelles découvertes et les dossiers les plus intéressants.