Des restes de Théia se cachent-ils au plus profond de la Terre ?

Illustration artistique de l'impact entre la Terre et Théia. Par Courtesy NASA/JPL-Caltech/T. Pyle

Les grandes provinces à faible vitesse de cisaillement (LLSVP) sont parmi les plus grandes et les plus étranges de toutes les structures isolées sur Terre. D’où viennent-elles ? D’après de nouvelles simulations, il pourrait s’agir des restes de Théia, cette protoplanète à qui nous devons la Lune.

Deux énormes « gouttes » de roches denses se cachent profondément dans les parties les plus basses du manteau de la Terre. Ces deux masses gigantesques, ce sont les grandes provinces à faible vitesse de cisaillement (LLSVP). Comme leur nom l’indique, ces deux structures se caractérisent par des vitesses d’ondes de cisaillement lentes. Il s’agit d’un type d’ondes élastiques capables de se déplacer à travers le corps d’un objet.

L’une de ces provinces est enterrée sous l’Afrique, l’autre sous le Pacifique. Chacune s’étend latéralement sur des milliers de kilomètres et sur plusieurs centaines de kilomètres verticalement à partir de la limite noyau-manteau. Ces anomalies sont si massives qu’elles génèrent à leur tour leurs propres perturbations.

Mais d’où ces deux énormes structures viennent-elles ? Beaucoup pensent que les LLSVP pourraient n’être que des accumulations de dalles océaniques subductées (des « cimetières de dalles », en quelque sorte). Néanmoins, tout le monde n’est pas d’accord. Certains pensent en effet qu’elles pourraient être beaucoup plus anciennes… et d’origine extraterrestre.

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Animation montrant les LLSVP inférées à l’aide de la tomographie sismique. Source : Wikipédia

Des restes de Théia

Selon la théorie dominante, notre jeune Terre serait entrée en collision avec un objet de la taille de Mars nommé Théia il y a environ 4,5 milliards d’années. Cet impact aurait provoqué une éjection de matière qui, sous l’effet de la gravité, se serait agglomérée pour ensuite former la Lune.

Qu’est-il alors advenu de Theia ? A-t-elle été détruite lors de l’impact ? A-t-elle simplement ricoché pour finalement poursuivre sa route ? On l’ignore encore.

En revanche, certains chercheurs pensent que des morceaux de cette ancienne protoplanète sont encore enfouis sous nos pieds. Et selon une nouvelle modélisation réalisée par des chercheurs de l’Arizona State University (ASU), les LLSVP pourraient représenter ces anciens fragments.

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Illustration artistique de l’impact entre la Terre et Théia. Crédits : Wikipédia.

« L’hypothèse de l’impact géant est l’un des modèles les plus examinés pour la formation de la Lune, mais les preuves directes indiquant l’existence de l’impacteur Theia restent insaisissables », indique l’auteur principal de ces travaux, Qian Yuan.

« Nous démontrons ici que le manteau de Theia peut être intrinsèquement plus dense de plusieurs pour cent que le manteau de la Terre. De fait, ces matériaux ont pu sombrer dans le manteau le plus bas de la Terre avant de s’accumuler en piles thermochimiques susceptibles de provoquer les LLSVP observées sismiquement« .

Ce n’est pour l’heure qu’une hypothèse appuyée par des simulations. Reste à savoir comment réagira la communauté scientifique à ces nouvelles propositions. Les résultats de ces travaux actuellement en cours d’examen, avant leur publication future dans les Geophysical Research Letters.