Dans l’État de Washington, aux États-Unis, se trouve une grotte pas comme les autres. Il y a environ quinze millions d’années, une coulée de basalte aurait en effet recouvert un ancien rhinocéros mort et gonflé, préservant ainsi un moule de son corps en pierre. C’est l’un des fossiles les plus insolites jamais découverts.
Un fossile est le reste, l’empreinte ou la trace d’un ancien organisme, généralement vieux de plusieurs milliers ou millions d’années. Les fossiles peuvent être des os, des dents, des coquilles, des feuilles, des empreintes de pas, des excréments, ou toute autre partie ou trace d’un organisme. Leur formation nécessite des conditions particulières, telles que l’enfouissement rapide dans des sédiments qui empêchent la décomposition de l’organisme et permettent sa préservation. Vous l’avez compris, tous les fossiles ne sont donc pas des os. D’ailleurs, l’un des plus étranges jamais découverts est en fait… une grotte.
La Rhino Cave
Nous sommes en juillet 1935. Deux couples en randonnée explorent une falaise de basalte à Jasper Canyon, à l’extrémité est de Blue Lake, dans l’État américain de Washington. Alors qu’ils sont à la recherche de bois pétrifié, l’un d’eux tombe soudainement sur une petite grotte nichée sur un rebord étroit, à environ soixante mètres au-dessus du lac. Curieux, il pénètre à l’intérieur et tombe sur des fragments d’os éparpillés sur le sol, dont un reste de mâchoire avec des dents.
Quelques jours plus tard, il remet les ossements à George Beck, paléontologue à la Washington State Normal School (aujourd’hui Central Washington University). Le chercheur et son assistant visiteront ensuite la grotte le mois suivant. Ils en conclurent finalement qu’il s’agissait en réalité du moulage d’un animal préhistorique.
Le moule d’un rhinocéros
Selon le récit depuis accepté, une éruption de fissure volcanique aurait libéré de la lave dans une rivière ou dans un lac peu profond où le cadavre d’un ancien rhinocéros gisait il y a environ quinze millions d’années. À en juger par les contours de la grotte, il apparaît en effet que le corps de l’animal était gonflé. Cela pourrait indiquer que la décomposition était déjà en train de s’installer. De plus, les pattes sont pointées vers le ciel, suggérant que l’animal était probablement sur le dos.
Pendant cette éruption, des couches de roche basaltique se seraient alors formées autour du rhinocéros à mesure qu’elles refroidissaient au contact de l’eau, préservant ainsi le contour de son corps.
Un animal de plus de deux mètres de long
Afin de mieux déterminer la forme du moule fossile, Wyatt Durham et Donald Savage, deux chercheurs, ont ensuite réalisé un moulage en plâtre de la grotte. La réplique s’est finalement retrouvée au musée de paléontologie de l’Université de Californie à Berkeley. Sur la base de sa forme et des ossements trouvés à l’intérieur, les chercheurs supposent que le rhinocéros appartenait au genre Diceratherium, un genre éteint de mammifères ongulés de la famille des rhinocérotidés. Ces animaux ont vécu en Amérique du Nord pendant l’Oligocène et le Miocène.
Ce type de rhinocéros possédait un fort dimorphisme sexuel, ce qui signifie que les mâles et les femelles semblaient visiblement différents les uns des autres. Alors que les femelles étaient sans cornes, chaque mâle adulte avait une paire de petites cornes côte à côte près du bout de son museau (voir ci-dessous).
Les dimensions de la grotte de Blue Lake suggèrent que l’animal mesurait environ 2,4 m de long du museau à l’arrière-train et mesurait un peu moins de 1,2 m de hauteur à l’épaule. À son époque, il pesait probablement environ une tonne.