La surface de la Terre est bombardée quotidiennement par des milliards de rayons cosmiques, des particules subatomiques à énergie extrêmement élevée en provenance de l’espace. Heureusement, notre planète peut compter sur sa magnétosphère pour s’en protéger. Mais que se passe-t-il lorsque le champ magnétique (dit aussi bouclier terrestre) s’affaiblit ?
Quand des rayons cosmiques se heurtent à la Terre…
Le rayonnement cosmique se compose de particules hautement énergétiques en provenance de l’espace lointain. Toutefois, de la même manière qu’elle intercepte les radiations solaires les plus dangereuses, la magnétosphère terrestre va en faire de même pour ces rayons cosmiques, si bien qu’au moment où ils atteignent le sol, leur intensité aura considérablement diminué.
Néanmoins, il ne faut pas voir la magnétosphère comme une région immuable enveloppant notre planète. Si le nord géographique reste toujours inchangé, le nord magnétique terrestre peut quant à lui changer au fil du temps en raison des mouvements dynamiques du noyau terrestre. Ce phénomène, appelé dérive du pôle magnétique, est un processus naturel qui se produit sur des échelles de temps géologiques. Il y a ainsi eu des périodes dans le passé lointain de la Terre où les pôles magnétiques se sont inversés. Lors de ce phénomène appelé inversion magnétique, le nord magnétique devient le sud et vice versa.
Il peut arriver également qu’au lieu de deux pôles magnétiques, la Terre se retrouve avec une multitude de pôles, induisant alors une excursion géomagnétique. Ces événements peuvent alors avoir une incidence significative sur la magnétosphère et considérablement affaiblir le champ magnétique terrestre.

Pour les chercheurs, ces phénomènes soulèvent une question cruciale
En effet, les périodes où l’intensité de la magnétosphère est basse sont-elles corrélées avec des bouleversements dans la biosphère (la zone où la vie terrestre existe, comprenant l’ensemble des écosystèmes et des organismes vivants depuis les plus hauts sommets jusqu’aux profondeurs marines abyssales, ainsi que les interactions entre eux et avec leur environnement physique) ?
Comme l’affirme Sanja Panovska, la chercheuse du Centre de recherche des sciences de la Terre de Potsdam (Allemagne) qui présentait l’assemblée générale d’avril dernier, « comprendre ces événements extrêmes est important dans le cas où une situation pareille se reproduirait dans l’avenir, pour les prédictions climatiques dans l’espace et pour évaluer leurs effets sur l’environnement ou sur le système terrestre. »
L’effet des rayons cosmiques à haute dose
Pour déterminer à quel moment la Terre a subi des bombardements de rayonnement cosmique plus soutenus, les chercheurs peuvent étudier la présence de différents isotopes, des variants d’un élément chimique qui présente avec le même nombre de protons, mais un nombre de neutrons différent, ce qui peut entraîner des propriétés physiques ou chimiques distinctes. Les nucléides cosmogéniques (ou isotopes cosmogéniques) produits par l’interaction des particules du rayonnement cosmique et de certains atomes de l’environnement terrestre peuvent en effet s’accumuler au fil du temps dans les sédiments, permettant alors leur étude.
Or, l’excursion de Laschamps il y a 41 000 ans est l’un des exemples les plus étudiés d’excursion du champ magnétique. Sanja Panovska a ainsi entrepris d’étudier le lien entre l’intensité de la magnétosphère et la concentration de nucléides cosmogéniques tels que le béryllium 10 observée au cours de cet événement.
Quelles conclusions ?
La chercheuse estime que le rythme moyen de production de béryllium 10 avait doublé par rapport à aujourd’hui. Cela indique ainsi que l’excursion de Laschamps, la magnétosphère était bel et bien très faible, permettant ainsi à plus de rayonnement d’attendre l’atmosphère terrestre et créant des averses de particules secondaires. Grâce à ses mesures, elle put reconstruire la magnétosphère terrestre et ainsi découvrir qu’elle avait rétréci au cours de cet événement à mesure que sa force s’affaiblissait.

Ces travaux ouvrent ainsi la voie à des recherches plus poussées pour une compréhension toujours plus fine des nucléides cosmogéniques, des bombardements de rayonnement cosmique et de leur effet sur la biosphère.
L’impact sur la santé humaine et les technologies modernes
Lors d’un affaiblissement important du champ magnétique terrestre, les conséquences ne se limitent pas uniquement aux écosystèmes ou aux phénomènes naturels. Les rayons cosmiques, en pénétrant plus profondément dans l’atmosphère, pourraient également avoir un effet direct sur la santé humaine, notamment en augmentant le risque d’exposition aux radiations pour les populations vivant à haute altitude ou pour les équipages aériens effectuant des vols fréquents. Par ailleurs, nos technologies modernes, telles que les satellites, les réseaux de communication et les systèmes électriques, pourraient être sérieusement perturbées par les averses de particules secondaires. Une intensification des tempêtes géomagnétiques entraînerait des pannes coûteuses et compromettrait des infrastructures vitales. Ces impacts soulignent l’importance cruciale de mieux comprendre et de surveiller l’évolution de la magnétosphère terrestre.