Il est possible de convaincre les gens qu’ils sont responsables de crimes qu’ils n’ont pas commis

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Les psychologues britanniques Julia Shaw et Stephen Porter ont réussi à implanter de faux souvenirs de crimes commis pendant l’adolescence chez plus de la moitié de leurs 60 sujets expérimentaux. Ils montrent encore une fois à quel point la mémoire est malléable…

Quand on pense à la mémoire, la première image qui vient à l’esprit est souvent celle d’un enregistrement vidéo, mais la réalité est bien plus complexe que cela. Nos souvenirs sont en grande partie des reconstructions. Le fonctionnement de notre mémoire fait encore l’objet de recherches soutenues, et l’expérience menée par Julia Shaw et Stephen Porter montre à quel point elle peut s’avérer malléable. Ils sont parvenus à implanter des actes aussi sérieux qu’un assaut à main armée dans les mémoires de volontaires.

Ce sont au total 60 étudiants qui ont été « interrogés » dans le but de modifier leurs mémoires sur une série de 3 entretiens de 40 minutes chacun. Lors du premier entretien, les chercheurs ont évoqué deux évènements qui s’étaient produits alors que les sujets expérimentaux étaient âgés de 11 à 14 ans. Un de ces évènements était réel, et connu des chercheurs grâce aux parents des sujets expérimentaux, et l’autre fictif. Pour certains, le faux évènement était la perpétration d’un crime, comme une agression ou un vol. Pour d’autres, il s’agissait d’une situation émotionnellement forte, la perte d’une importante somme d’argent, une blessure ou une attaque par un chien par exemple.

Pour rendre les histoires fictives plus crédibles, les chercheurs y ont intégré des détails réels, là encore fournis par les parents. Cette stratégie s’est avérée extrêmement efficace et 21 des 30 participants auxquels les chercheurs ont raconté une histoire fictive de comportement criminel passé ont développé un faux souvenir de l’épisode, en inventant même des détails sur la façon dont ils avaient prétendument échappé à la police. Les faux souvenirs étaient toutefois reconnaissables des vrais, car moins riches en détails, et reportés avec moins de confiance.

Les faux souvenirs sont un énorme problème judiciaire. Certaines techniques d’interrogation employées par les forces de l’ordre tendent en effet à créer un environnement propice à leur formation, et ainsi à pousser certaines personnes à avouer un crime qu’elles n’ont jamais commis. Les psychologues encouragent d’ailleurs les interrogateurs à changer leurs méthodes, afin de minimiser le problème.

Sources : Psychological Science (article de vulgarisation plus complet en anglais) — Article de recherche