Évolution : les humains plus « économes » en eau que les autres grands singes

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Crédits : Institut Jane Goodall France

Les humains ont développé de plus gros cerveaux que nos plus proches parents animaux. Gourmands en énergie, ils nous obligent à consommer beaucoup plus de calories. En revanche, on ne peut pas en dire autant pour la consommation d’eau qui est moins important chez l’humain que chez les grands singes.

Notre corps perd constamment de l’eau : quand on transpire, que l’on respire ou lorsque nous faisons nos besoins. Cette eau doit être reconstituée. Si vous ne buvez pas assez, les signaux de soif du corps entrent alors en jeu. À l’inverse, si vous buvez plus d’eau que votre corps n’en a besoin, les reins se débarrassent du liquide supplémentaire.

Les humains plus efficaces que les grands singes

Dans le cadre d’une étude récente, une équipe d’anthropologues de l’Université Duke (États-Unis) s’est intéressée à la quantité d’eau perdue et remplacée (boissons et aliments) chaque jour par les humains. Ils ont ensuite comparé ces données avec celles de 72 autres grands singes (gorilles, chimpanzés et bonobos) évoluant dans des zoos et sanctuaires.

Résultat : l’humain moderne traite en moyenne trois litres d’eau quotidiennement, tandis que nos cousins en traitent parfois deux fois plus (de 30% à 50%).

Ces résultats, publiés dans la revue Current Biology, sont quelque peu inattendus dans la mesure où nous développons dix fois plus de glandes sudoripares que nos cousins. Nos cousins sont également beaucoup moins actifs. « La plupart des grands singes passent dix à douze heures par jour à se reposer ou à se nourrir, puis ils dorment pendant dix heures. Ils ne bougent vraiment que quelques heures par jour« , souligne en effet Herman Pontzer, principal auteur de ces travaux.

Aussi, nous pourrions nous attendre à ce nous perdions plus d’eau chaque jour, et non moins. Pourtant, même en tenant compte les températures extérieures, la taille du corps et autres niveaux d’activité, les humains ont toujours besoin de moins d’eau pour maintenir un équilibre sain.

« Par rapport à d’autres singes, les humains de cette étude (379 sujets de tous horizons) avaient un renouvellement d’eau considérablement plus faible et consommaient moins d’eau par unité d’énergie alimentaire métabolisée« , écrivent les auteurs.

Ces travaux nous rappellent d’ailleurs qu’en tant que bébés, le rapport eau/calories du lait maternel humain est 25% inférieur à celui des laits d’autres grands singes.

chimpanzés singes
Crédits : Suju/pixabay

La grande question est : pourquoi ?

Ces résultats suggèrent qu’un grand changement s’est opéré au cours de notre évolution, permettant à nos ancêtres de réduire la quantité d’eau que notre corps utilise chaque jour pour rester en bonne santé.

« Cet ancien changement a probablement permis à nos ancêtres chasseurs-cueilleurs de s’aventurer plus loin des ruisseaux et des points d’eau à la recherche de nourriture« , suggère le chercheur. « Le simple fait de pouvoir rester un peu plus longtemps sans eau aurait été un grand avantage, car les premiers humains ont commencé leur vie dans des paysages de savane arides« .

D’autres recherches seront nécessaires pour comprendre quand, pourquoi, mais aussi comment ce changement physiologique s’est-il opéré ?

Dans leur étude, les auteurs évoquent la forme de notre nez. Des preuves fossiles suggèrent en effet qu’il y a environ 1,6 million d’années, avec la création de l’Homo erectus, les humains ont commencé à développer un nez plus proéminent. À l’inverse, nos cousins ​​gorilles, chimpanzés et bonobos ont un nez beaucoup plus plat.

Or, les structures de nos voies nasales favorisent la condensation de la vapeur d’eau de l’air expiré, la transformant en liquide à l’intérieur de notre nez où elle peut être réabsorbée. Avoir un nez plus proéminent pourrait donc avoir aidé les premiers humains à retenir plus d’humidité à chaque respiration.