Il est généreux d’appeler la guerre anglo-Zanzibar une « guerre ». Cette confrontation de 1896 entre la Royal Navy britannique et un sultan un peu têtu, communément citée comme la guerre la plus courte jamais enregistrée, aurait en effet duré moins d’une heure. Que sait-on de ce conflit ?
Au XIXe, Zanzibar était un état insulaire de l’Océan Indien (l’île fait partie aujourd’hui de la Tanzanie). À l’époque, le sultanat local était un puissant empire commercial. On exportait de l’ivoire et des épices, tandis qu’on importait des armes et des textiles. Cependant, le commerce le plus lucratif à Zanzibar était probablement celui des esclaves africains, ce qui ne plaisait pas aux Britanniques qui tentaient à l’époque de mettre fin à cette pratique en attaquant des navires négriers présumés dans l’océan Indien.
Cela étant dit, la Grande-Bretagne et l’Allemagne étaient intéressées par la région depuis longtemps, et les deux puissances s’opposèrent pour le contrôle du commerce et des territoires dans la région tout au long de la fin du XIXe siècle. En 1890, les deux nations signèrent finalement un traité délimitant leurs « zones d’influence ». Dès lors, Zanzibar devint un « protectorat » britannique (pas tout à fait une colonie, mais toujours sous la coupe du gouvernement et de l’armée britanniques).
Après avoir revendiqué Zanzibar comme protectorat, les Britanniques voulurent donc installer un sultan pour mettre fin à la traite des esclaves (tout en bénéficiant des richesses de la région, naturellement). Leur choix se porta sur Hamad bin Thuwaini en 1893. Ce dernier régna pendant trois ans avant de décéder subitement le 25 août 1896. Certains diront qu’il fut empoisonné par son neveu, Khalid bin Barghash, qui s’est immédiatement installé dans le palais à sa place.
Une guerre de 38 minutes
Trop indépendant (ou pas assez soumis, c’est selon), Khalid bin Barghash n’était pas vraiment du goût des Britanniques. En réponse, le gouvernement s’engagea dans une pratique populaire de l’époque appelée « politique de la canonnière » qui consistait à tirer depuis la mer au canon sur les côtes des États qui ne payaient pas leurs dettes financières. Trois navires de guerre navals furent ainsi placés en face du palais, bâti sur le front de mer, ordonnant au sultan de quitter les lieux avant 9 heures du matin le lendemain.
Face à la menace britannique, le sultan déploya des canons d’artillerie lourde et posta des milliers de personnes, principalement des civils et des esclaves, autour du palais. À 8 heures du matin, le 26 août, il informa Basil Cave, le consul britannique, de ses intentions : « Nous n’avons pas l’intention d’abaisser notre drapeau et nous ne pensons pas que vous ouvririez le feu sur nous« .
À 9 heures du matin, les Britanniques tinrent malgré tout leur promesse. Il n’aura fallu que 38 minutes (ou 42 minutes selon certains témoignages) pour que les défenses du sultan soient complètement détruites. On estime qu’environ 500 Zanzibarites furent tués ou blessés lors du bombardement. De l’autre côté, pas un seul marin britannique ne fut blessé. Le sultan avait quant à lui quitté les lieux deux minutes après le début des hostilités pour se réfugier au consulat d’Allemagne.

Avec son départ, les Britanniques installèrent un nouveau sultan qui interdit immédiatement la traite des esclaves à Zanzibar.