Chaque année, la grêle est à l’origine de coûts et de dommages considérables sur les cultures, véhicules, infrastructures ou écosystèmes. Rien qu’aux États-Unis, le coût financier s’élève en moyenne à dix milliards de dollars par an et peut facilement doubler lors des mauvaises années. Pour ces raisons, un des enjeux majeurs de l’étude de la grêle est de comprendre comment celle-ci est affectée par le réchauffement global du climat.
Si la question est importante, elle est cependant difficile. En effet, la grêle est un phénomène de très petite échelle relativement rare en un lieu donné. Elle est donc à la fois difficile à observer et à simuler. Les modèles climatiques et météorologiques ne la représentant pas en tant que telle. En outre, elle dépend de paramètres qui tendent à évoluer dans des directions contradictoires, rendant l’effet net d’autant plus complexe à identifier. Enfin, les biais introduits par la hausse du nombre d’observateurs ou des zones exposées doivent être pris en compte.
Même si des incertitudes fortes demeurent et appellent à un renforcement de la recherche sur le sujet, les efforts menés par les scientifiques durant la dernière décennie permettent de dégager une image de plus en plus précise du lien entre l’évolution du climat et celle du risque de grêle. Dans la suite de cet article, nous nous concentrons sur les évolutions passées et futures pour l’Europe et la France en saison chaude sur la base d’une étude de synthèse parue dans la revue Nature Reviews: Earth & Environment.
Orage de grêle : quelles tendances passées ?
Selon l’état actuel des connaissances, la fréquence des épisodes de grêle est sujette à une légère hausse à l’échelle du continent européen, et ce, aussi bien pour les évènements de petite que de grosse grêle, mais avec de fortes disparités régionales. En France, à l’exception des Pyrénées, on n’observe aucune évolution significative des chutes de grêle. Au sud de l’Hexagone, on soupçonne cependant une hausse spécifique aux épisodes de grosse grêle. Il est difficile de dire s’il s’agit là d’un signe du réchauffement anthropique ou plus simplement de la variabilité naturelle du climat.
« En France et en Italie, les données des grêlimètres montrent globalement peu d’évolution dans la fréquence de la grêle, mais révèlent des tendances positives pour la grosse grêle ou les quantités dérivées, comme l’énergie cinétique », rapportent les chercheurs. « Les données combinées des régions atlantique et pyrénéenne entre 1989 et 2009 montrent une augmentation de la taille des grêlons et certaines indications suggèrent une périodicité d’environ six ans de leur fréquence ».
Et quelles projections futures ?
En ce qui concerne les prochaines décennies, les études projettent une hausse des épisodes de grosse grêle en Europe avec là aussi d’importantes disparités régionales. Par exemple, si l’on espère une baisse au Royaume-Uni, on se prépare plutôt à une augmentation en Allemagne et en Italie. En France, la distribution des tailles de grêlons devrait se déplacer vers les hautes valeurs, à la fois en raison d’une diminution des épisodes de petite grêle et d’une augmentation des épisodes de grosse grêle.
« Dans la région atlantique de la France, l’augmentation de la hauteur du niveau de fonte devrait faire évoluer les grêlons vers de plus gros spécimens, réduisant ainsi le nombre de grêlons, mais augmentant l’intensité de la grêle tout en la faisant plus ou moins disparaître dans les régions où les grêlons sont habituellement de petite taille », notent les chercheurs.
De façon générale, l’étude indique que « dans la plupart des régions, l’intensité des orages de grêle devrait augmenter avec le changement climatique ». Cette évolution est attribuée à une humidification de la basse atmosphère et à l’augmentation résultante de l’instabilité convective lors des dégradations orageuses. L’élévation de l’altitude de fonte en climat plus chaud favorise également la grosse grêle. Enfin, les changements de cisaillement vertical du vent ne joueraient qu’un rôle limité dans ces évolutions de long terme.