Depuis plus de 150 ans, les astronomes observent la Grande Tache rouge (GRS) de Jupiter, une tempête gigantesque assez large pour engloutir la Terre entière. Pourtant, malgré des décennies d’études, cette mystérieuse formation continue de surprendre les scientifiques. Grâce à des observations récentes effectuées par le télescope spatial Hubble, les chercheurs ont en effet découvert que la GRS n’est pas aussi stable qu’elle semble l’être. En effet, la tempête oscille, rétrécit et s’agrandit de manière inattendue comme un « bol de gélatine ». Ces nouvelles observations offrent des perspectives fascinantes sur le fonctionnement de cette incroyable tempête jupitérienne et pourraient même aider à mieux comprendre les phénomènes météorologiques sur d’autres planètes, voire sur la Terre.
Qu’est-ce que la Grande Tache rouge ?
La Grande Tache rouge est l’une des caractéristiques les plus emblématiques de la planète Jupiter. Il s’agit d’un anticyclone gigantesque (une tempête qui tourne dans le sens inverse des cyclones terrestres). Elle mesure en effet environ 16 000 kilomètres de large, soit plus d’une fois la taille de la Terre, et tourbillonne depuis au moins 350 ans. Sa couleur rouge distinctive, qui lui a valu son nom, est encore mal comprise par les scientifiques, mais elle pourrait être liée à des composés chimiques dans l’atmosphère de la planète.
Bien que de nombreuses tempêtes sur Terre se forment et disparaissent en quelques jours ou semaines, la GRS persiste depuis des siècles. Cette longévité et cette taille hors du commun ont ainsi toujours fasciné les astronomes qui tentent de comprendre pourquoi elle continue à exister aussi longtemps. Grâce à de nouvelles techniques d’observation, les chercheurs comprennent aujourd’hui que cette tempête gigantesque est bien plus dynamique qu’ils ne le pensaient.
Les découvertes récentes grâce à Hubble
Entre décembre 2023 et mars 2024, Hubble a observé la Grande Tache rouge pendant une période de 90 jours. Les chercheurs ont ensuite combiné les images de Hubble prises sur plusieurs jours pour créer une sorte de film accéléré du comportement de la GRS. Grâce à cette technique, ils ont pu observer les mouvements subtils de la tempête avec une précision que l’on ne peut pas obtenir avec des images prises à un seul moment donné.
Ces observations ont révélé que la GRS n’est pas aussi fixe qu’on le croyait. En effet, elle oscille, rétrécit, puis s’agrandit légèrement, tout en changeant de vitesse. Ce phénomène est comparable à un bol de gélatine qui se mettrait à trembler. Les oscillations de la GRS semblent être liées à des interactions complexes avec les puissants courants-jets de Jupiter, des vents rapides qui circulent autour de la planète. En accélérant et en ralentissant, la tempête semble se battre contre ces vents, ce qui entraîne ses oscillations géantes.
Les observations à l’ultraviolet ont également révélé que le cœur de la tempête devient plus lumineux lorsque la GRS atteint sa plus grande taille dans son cycle d’oscillation. Cela suggère que moins de particules nuageuses sont absorbées dans la haute atmosphère à ce moment-là, ce qui modifie l’apparence de la tempête.
C’est la première fois que ce genre de mouvement est observé sur la GRS. Jusqu’à présent, les scientifiques pensaient que la tempête changeait légèrement de position, mais ils n’avaient jamais remarqué ces oscillations dans sa taille.
Pourquoi est-ce important ?
L’étude de la Grande Tache rouge de Jupiter ne se limite pas à une simple fascination pour cette immense tempête. En effet, elle revêt aussi une importance considérable pour les scientifiques qui cherchent à mieux comprendre les mécanismes météorologiques à l’œuvre sur Terre. En étudiant cette tempête qui persiste depuis des siècles, les chercheurs peuvent notamment faire des parallèles avec des phénomènes météorologiques terrestres comme les ouragans ou les anticyclones. Par exemple, la manière dont la GRS interagit avec les courants-jets de Jupiter pourrait éclairer la dynamique des vents violents qui se forment autour des cyclones sur Terre.
L’intérêt pour la GRS va également au-delà des seules planètes de notre Système solaire. En effet, les découvertes sur la manière dont cette tempête interagit avec l’atmosphère de Jupiter peuvent aider à interpréter les données que les astronomes recueillent sur des exoplanètes. Bien que nous soyons encore loin de pouvoir observer leurs atmosphères avec autant de détails que celles des planètes comme Jupiter, chaque avancée que nous faisons en étudiant des phénomènes comme la GRS contribue à améliorer notre capacité à modéliser et comprendre les climats exoplanétaires.