Des chercheurs français viennent de démontrer qu’une espèce de guêpe était capable de modifier le comportement d’une coccinelle en lui injectant un virus. Une fois devenue « zombie » cette dernière protège alors la progéniture de son assaillant comme si sa propre vie en dépendait.
Contrairement à ce que l’on pourrait supposer de prime abord, le parasitage visant à contrôler le comportement de l’hôte n’est pas un phénomène si rare dans le règne animal. C’est ainsi que nous vous présentions, il y a quelques mois, le cas de la Sacculina carcini, un crustacé qui parasite certains crabes dans le but de les forcer à s’occuper de sa progéniture. Aujourd’hui, c’est une nouvelle étude, publiée dans la revue Proceedings of the Royal Society B, qui vient nous faire découvrir la technique de reproduction tout à fait particulière de la guêpe parasitoïde Dinocampus coccinellae.
Comment cet insecte procède-t-il ? Lorsque le moment est venu de pondre, la Dinocampus coccinellae choisit une coccinelle maculée afin de lui injecter ses œufs dans l’abdomen. Puis, pendant près de 20 jours, les larves se développent en se nourrissant exclusivement des fluides du coléoptère. Finalement, à l’issu de cette période, la seule larve parvenue à maturité s’extrait en passant par le dos de son hôte avant de tisser un cocon entre ses pattes. C’est à ce moment que se produit un phénomène pour le moins étonnant : au lieu de prendre la fuite, la coccinelle se met alors à jouer le rôle de « garde du corps » de son parasite. « Elle est paralysée, mais tressaute et s’agite suffisamment pour dissuader les prédateurs de l’approcher », explique Nolwenn Dheilly, co-auteur de l’étude, relayée par le site huffingtonpost.
Si cette méthode de reproduction était déjà connue depuis un certain temps par la communauté scientifique, une question demeurait jusqu’alors en suspens : pourquoi la coccinelle reste-t-elle, pendant près de deux semaines, à défendre le cocon avec autant de ferveur ?
Un virus responsable de ce comportement inattendu
En tentant de répondre à cette interrogation, les chercheurs de cette étude se sont rendu-compte qu’une telle manipulation ne pouvait se faire qu’à travers l’intervention d’un troisième élément : un virus à ARN, initialement présent dans l’appareil génital de la guêpe. « Nous l’avons repéré, qualitativement et quantitativement, dans la paroi de l’oviducte de la guêpe, dans ses larves, et dans la coccinelle au cours du développement de la larve », déclare Nolwenn Dheilly.
Ce virus, baptisé par les scientifiques Dinocampus coccinellae Paralysis Virus (DcPV), serait donc transmis à la coccinelle en même temps que les œufs. Il entraînerait ensuite une neurodégénérescence progressive qui serait responsable des tremblements et de la paralysie observés lors de la dernière phase du développement de la larve.
Par ailleurs, il semblerait que l’action de ce virus soit réversible puisque près d’un tiers des coccinelles retrouvent par la suite une vie normale. « C’est comme si le virus avait supprimé les défenses immunitaires de la coccinelle, et que celles-ci se réactivaient, éliminant alors le virus à la fin du processus », poursuit la chercheuse.
Ce cas de parasitisme extrêmement rare illustre donc le fait que des micro-organismes puissent être utilisés comme de véritables armes biologiques par certains animaux. Un constat qui ouvre la voie à de toutes nouvelles perspectives de recherche concernant les mécanismes parasitaires.
Sources: Huffingtonpost – Sciences&Avenir