Les glaciers de montagne renferment moins d’eau qu’on ne pensait

montagne glaciers
Crédits : Wikimedia Commons.

Des chercheurs de l’Université Grenoble Alpes (France) et du Dartmouth College (États-Unis) ont élaboré le premier atlas mondial détaillant le mouvement et l’épaisseur des glaciers de montagne. Or, les données montrent que la quantité d’eau stockée par ces derniers est bien moins importante qu’on ne le pensait jusqu’à présent. L’étude a été publiée dans la revue Nature Geoscience ce 7 février.

Moyennant 800 000 images à haute résolution acquises entre 2017 et 2018 par deux satellites en orbite basse, l’atlas comprend plus de 200 000 glaciers terrestres correspondant à 98 % de la surface totale dans le monde. Au terme de ces travaux, les chercheurs ont découvert que la quantité de glace était inférieure de 20 % à celle rapportée par les estimations précédentes. Et pour cause, de nombreux glaciers sont moins épais qu’attendu.

Glaciers : moins d’eau en moyenne mondiale, mais des bilans régionaux contrastés

« La découverte d’une moindre quantité de glace est importante et aura des implications pour des millions de personnes dans le monde », relate Mathieu Morlighem, coauteur de l’étude. En effet, elle demandera d’ajuster les projections de la hausse du niveau des mers et du volume d’eau disponible localement pour la production hydroélectrique ou l’irrigation. « Les résultats suggèrent que les glaciers ont une contribution potentielle à l’élévation du niveau des mers de 257 ± 85 millimètres, soit 20 % de moins que les estimations précédentes », précise l’étude dans son résumé.

Si les glaciers stockent moins d’eau en moyenne mondiale, le tableau est cependant beaucoup plus contrasté à l’échelle régionale. Tandis que les Andes tropicales abritent par exemple 27 % d’eau en moins, l’Himalaya fait figure d’exception avec 37 % d’eau en plus. Les Alpes européennes en renferment quant à elles 8 % en moins. « La tendance globale au réchauffement et à la perte de masse restent inchangées », souligne Mathieu Morlighem. « Cette étude fournit l’image nécessaire pour que les modèles offrent des projections plus fiables du temps qu’il reste à ces glaciers ».

Glaciers Alpes
Vue aérienne des Alpes. Crédits : Pxhere.

L’estimation du volume des glaciers, un travail complexe qui garde son lot d’incertitudes

Les auteurs expliquent que la surestimation moyenne de l’épaisseur des glaciers est due à un manque de mesures en profondeur et donc au fait que de nombreux glaciers sont seulement étudiés de façon partielle. Par ailleurs, leur vitesse d’écoulement n’est souvent pas connue alors qu’elle peut fournir des informations sur la répartition des zones plus ou moins épaisses sur chaque glacier. Grâce à ce nouvel atlas, les vitesses d’écoulement sont désormais rapportées pour la quasi-totalité des glaciers du monde.

« Nous considérons généralement les glaciers comme de la glace solide qui peut fondre en été, mais la glace coule en fait comme un sirop épais sous son propre poids », explique le scientifique. « La glace s’écoule des hautes vers les basses altitudes où elle finit par se transformer en eau. Grâce à l’imagerie satellitaire, nous sommes en mesure de suivre le mouvement de ces glaciers depuis l’espace à l’échelle mondiale et, à partir de là, d’en déduire la quantité de glace tout autour du monde ».

Si ces travaux signent de réels progrès quant à la quantité d’eau renfermée par les glaciers, ils n’en restent pas moins accompagnés de marges d’erreurs persistantes. C’est tout particulièrement vrai dans les secteurs très peuplés d’Asie et d’Amérique du Sud. Aussi, les auteurs appellent à une réévaluation du volume des glaciers implémenté dans les modèles numériques et à la mise en place de mesures directes de l’épaisseur des glaces dans les régions qui restent encore (trop) mal documentées.