De gigantesques chiens-ours vivaient en France il y a 12 millions d’annĂ©es

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Tartarocyon cazanavei . Crédits : Denny Navarra.

Une Ă©quipe de palĂ©ontologues dĂ©crit une nouvelle espèce d’hypercarnivore de grande taille de la famille des AmphicyonidĂ©s, communĂ©ment appelĂ©s chiens-ours, Ă  partir d’une mandibule fossilisĂ©e isolĂ©e dans le sud de la France. Les dĂ©tails de l’Ă©tude sont publiĂ©s dans la revue PeerJ.

Un nouveau grand prédateur en France

Les AmphicyonidĂ©s reprĂ©sentent l’un des groupes de prĂ©dateurs les plus caractĂ©ristiques des faunes europĂ©ennes passĂ©es. Ils sont souvent appelĂ©s familièrement chiens-ours en raison de leur ressemblance Ă  ces deux espèces croisĂ©es. D’après les archives fossiles, ces animaux seraient apparus pour la première fois durant l’Ă©ocène il y a environ trente-six millions d’annĂ©es avant de s’Ă©teindre avant la fin de cette Ă©poque, il y a environ 7,5 millions d’annĂ©es.

Ces chiens-ours Ă©taient Ă©galement Ă©cologiquement diversifiĂ©s et variaient en masse corporelle. Certains pouvaient peser seulement neuf kilos, quand d’autres en imposaient beaucoup plus avec plus de trois cents kilos sur la balance.  Leurs rĂ©gimes diffĂ©raient Ă©galement. Certains Ă©taient mĂ©socarnivores, quand d’autres Ă©taient des hypercarnivores.

L’espèce est ici dĂ©crite Ă  partir d’une mĂ¢choire infĂ©rieure fossilisĂ©e dĂ©couverte dans la commune de Sallespisse, dans les PyrĂ©nĂ©es-Atlantiques. Le fossile se compose d’une quatrième prĂ©molaire infĂ©rieure unique. Il s’agit d’une dent particulièrement importante dans la dĂ©termination des espèces et des genres.

Bien que ce nouveau taxon soit proche en taille de certains amphicyonidĂ©s europĂ©ens du Miocène (comme Amphicyon ou Megamphicyon), la morphologie unique de sa dent, inconnue dans ce clade, a permis Ă  l’Ă©quipe de chercheurs dirigĂ©e par le palĂ©ontologue Bastien Mennecart, du MusĂ©e d’histoire naturelle de BĂ¢le, de dĂ©terminer qu’il s’agissait d’un « nouvel animal » pour la science. L’espèce est baptisĂ©e Tartarocyon cazanavei. Cet animal nouvellement identifiĂ© avait une masse corporelle estimĂ©e Ă  environ deux cents kilos et vivait il y a entre 12,8 et 12 millions d’annĂ©es.

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La mĂ¢choire fossilisĂ©e. CrĂ©dits : FlorĂ©al SolĂ© et coll. (2022), Peerj .

Pourquoi la découverte est-elle importante ?

Le Miocène moyen (15,97 – 11,63 Ma) est une pĂ©riode de grand intĂ©rĂªt concernant le changement climatique et la dispersion de la faune en Eurasie et en Afrique. Le Langhien (environ 15,97-13,65 Ma) englobe l’optimum climatique du Miocène moyen, une augmentation globale de la tempĂ©rature d’environ 5 °C, tandis que des tempĂ©ratures plus fraĂ®ches se sont installĂ©es pendant le Serravallien (13,82 – 11,63 Ma).

Ces Ă©vĂ©nements ont entraĂ®nĂ© d’importants changements environnementaux et des renouvellements et Ă©changes fauniques. MalgrĂ© les nombreuses archives fossiles d’invertĂ©brĂ©s, on sait actuellement peu de choses sur les liens fauniques entre la partie nord et sud de la chaĂ®ne des PyrĂ©nĂ©es au cours du Miocène moyen en raison d’un manque de restes de vertĂ©brĂ©s continentaux. En effet, la France a Ă©tĂ© inondĂ©e par la mer Ă  plusieurs reprises au cours du Miocène infĂ©rieur et moyen. En outre, le soulèvement continu des PyrĂ©nĂ©es formant une barrière naturelle entre la pĂ©ninsule ibĂ©rique et le reste de l’Europe n’a pas aidĂ© non plus.

La dernière transgression dans la rĂ©gion du Sud-ouest s’est produite au Serravallien (13,82 – 11,63 Ma). Cette mer a dĂ©posĂ© dans la rĂ©gion d’Orthez, y compris Ă  Sallespisse, une faune marine particulièrement abondante isolĂ©e dans des dĂ©pĂ´ts sableux coquilliers. Cependant, les dĂ©couvertes de vertĂ©brĂ©s terrestres Ă©voluant sur la bordure nord des PyrĂ©nĂ©es il y a treize Ă  onze millions d’annĂ©es sont très rares.

Ce fossile offre donc aux chercheurs l’opportunitĂ© d’explorer le dĂ©veloppement des chiens-ours europĂ©ens dans le contexte d’Ă©vĂ©nements environnementaux, dont certains nous font Ă©cho aujourd’hui.