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Crédits : Sciencepost/généré par Grok

La fusion des trous noirs nous dira si l’Univers obéit à la symétrie

Avec ses lois complexes et ses phénomènes mystérieux, l’Univers semble suivre des principes profonds et universels : la symétrie en est un. Depuis le début du vingtième siècle, les découvertes majeures en physique ont révélé que les lois naturelles, des plus simples aux plus complexes, sont intimement liées à des symétries invisibles. L’une des plus grandes avancées dans ce domaine est le théorème de Noether, formulé par Emmy Noether en 1918, qui démontre qu’à chaque loi physique de conservation correspond une symétrie fondamentale. Mais comment tester ces idées dans des contextes extrêmes ? La réponse pourrait bien se trouver dans l’étude des fusions de trous noirs.

Qu’est-ce que la symétrie et pourquoi est-elle essentielle ?

En physique, la symétrie désigne une propriété qui reste inchangée lors de certaines transformations. Par exemple, une balle frappée aujourd’hui par une batte se comportera de la même manière qu’hier. Cette symétrie temporelle signifie que l’énergie est conservée. De même, l’espace est symétrique dans toutes les directions : peu importe l’orientation, les lois de la physique sont les mêmes. Cette idée simple, mais fondamentale est au cœur du théorème de Noether qui révèle que chaque loi de conservation (comme celle de l’énergie ou de l’impulsion) correspond à une symétrie fondamentale dans l’Univers.

Les symétries sous-tendent non seulement les lois de la physique classique, mais aussi des domaines plus avancés, comme la physique des particules. L’un des aspects les plus fascinants de cette connexion entre symétries et lois fondamentales est la symétrie charge-parité (CP) qui stipule que chaque particule de matière doit avoir une particule d’antimatière correspondante. Néanmoins, des découvertes récentes ont montré que cette symétrie pouvait être violée, notamment dans le domaine de la physique des particules.

La relativité générale et les symétries gravitationnelles

Les symétries sont également au cœur de la relativité générale d’Einstein qui décrit la gravité comme une déformation de l’espace-temps. Bien que les équations d’Einstein soient complexes, elles reposent sur des principes de symétrie. Le principe d’équivalence d’Einstein découle par exemple de symétries physiques fondamentales. Cette même notion de symétrie est cruciale pour tester la relativité générale dans des contextes extrêmes, comme ceux où des trous noirs se forment et interagissent.

Les fusions de trous noirs offrent ainsi une opportunité unique pour observer des phénomènes extrêmes où ces symétries peuvent être testées. Mais comment les chercheurs peuvent-ils savoir si la relativité générale et ses symétries sont respectées dans de telles situations ?

Fusions de trous noirs : des tests de symétrie à l’échelle cosmique

La fusion de trous noirs stellaires génère des ondes gravitationnelles (des vagues dans l’espace-temps) qui sont détectables par des observatoires comme LIGO. En analysant ces ondes, les scientifiques peuvent tester des principes fondamentaux de la physique, y compris les symétries. Une étude récente publiée dans Physical Review Letters a examiné la polarisation des ondes gravitationnelles issues de fusions de trous noirs. La polarisation est liée à la rotation des trous noirs au moment de la collision et l’étude a permis de tester la symétrie de la parité. Selon le modèle standard de la relativité générale, cette symétrie devrait être conservée. Les résultats ont confirmé cette hypothèse : la parité semble être respectée lors des fusions observées.

Ce test est important, car il montre que les trous noirs se comportent conformément aux symétries prédites par la relativité générale. Cependant, les chercheurs soulignent que les données actuelles sont encore limitées. Le nombre relativement faible de fusions observées ne permet pas de conclure de manière définitive que la parité est toujours respectée dans toutes les conditions possibles.

Le recul des trous noirs : une autre façon de tester la symétrie

Un autre aspect important des fusions de trous noirs est le recul du trou noir résultant. Lorsqu’un système de trous noirs fusionne, le trou noir final peut recevoir un coup gravitationnel qui l’envoie loin de son point d’origine. Si les lois physiques respectent la symétrie spatiale, alors ce recul ne devrait pas montrer de biais. En d’autres termes, on ne devrait pas observer plus de trous noirs qui s’éloignent de nous que de trous noirs qui se rapprochent. Là encore, l’étude récente n’a révélé aucune violation de cette symétrie, ce qui confirme les prédictions faites par la relativité générale.

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Illustration du recul d’un trou noir et de son recul symétrique en miroir. Crédits : Instituto Galego de Física de Altas Enerxías (IGFAE)

Des résultats encourageants, mais encore insuffisants

Les recherches sur les fusions de trous noirs sont prometteuses, mais les données actuelles ne permettent pas encore de tirer des conclusions définitives sur la validité des symétries dans des contextes extrêmes. Ces études représentent cependant une avancée significative dans notre compréhension des lois de la gravité et de la relativité générale. Les tests de symétrie dans les fusions de trous noirs pourraient, à terme, nous aider à répondre à l’une des grandes questions de la physique : la gravité quantique qui cherche à combiner la relativité générale et la mécanique quantique, viole-t-elle certaines symétries ?

En attendant, les fusions de trous noirs continuent à offrir des opportunités uniques pour tester les principes fondamentaux qui régissent le cosmos. Elles nous rappellent que même dans les situations les plus extrêmes, les symétries demeurent au cœur de notre quête pour comprendre l’Univers dans son ensemble.

Brice Louvet

Rédigé par Brice Louvet

Brice est un journaliste passionné de sciences. Ses domaines favoris : l'espace et la paléontologie. Il collabore avec Sciencepost depuis près d'une décennie, partageant avec vous les nouvelles découvertes et les dossiers les plus intéressants.