Fusion nucléaire : quels sont les principaux défis à relever pour « imiter les étoiles » ?

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Crédits : dani3315 / istockphoto

La fusion nucléaire est un processus dans lequel deux noyaux atomiques légers se combinent pour former un noyau plus lourd, libérant ainsi une grande quantité d’énergie. Les recherches récentes ont permis de faire des avancées significatives dans ce domaine avec des implications potentiellement révolutionnaires pour la production d’énergie propre et durable. Cependant, il reste encore de nombreux défis à relever.

Fusion et fission, quelles différences ?

La fusion nucléaire ne doit pas être confondue avec le processus de fission nucléaire. Bien qu’ils impliquent tous deux des réactions au niveau des noyaux atomiques permettant la libération d’énergie, ils présentent des mécanismes et des caractéristiques distinctes.

Comme dit plus haut, la fusion nucléaire est un processus dans lequel deux noyaux atomiques légers se combinent pour former un noyau plus lourd. Ce processus est à l’origine de l’énergie produite par le Soleil et les autres étoiles. Dans les réactions de fusion les plus courantes, des isotopes d’hydrogène, tels que le deutérium et le tritium, fusionnent pour former un noyau d’hélium, libérant un neutron et une grande quantité d’énergie sous forme de rayonnement.

La fission nucléaire est en revanche un processus dans lequel un noyau atomique lourd, comme l’uranium-235 ou le plutonium-239, se divise en deux noyaux plus légers (appelés produits de fission) et libère de l’énergie. Elle peut être initiée en bombardant un noyau lourd avec un neutron, ce qui rend le noyau instable et provoque sa division. La fission libère également des neutrons supplémentaires qui peuvent ensuite provoquer la fission d’autres noyaux, créant une réaction en chaîne.

Au-delà de ces différences, notez que la fusion nucléaire libère une énergie par réaction bien plus importante que la fission nucléaire. Cela signifie que ce processus a un potentiel énergétique plus élevé et pourrait produire plus d’énergie à partir de quantités de combustible plus petites. Autre différence : la fission nucléaire produit des déchets radioactifs de longue durée nécessitant une gestion et un stockage sécurisés pendant des milliers d’années. En revanche, les déchets radioactifs produits par la fusion sont moins problématiques et ont des périodes de demi-vie plus courtes, ce qui facilite leur gestion.

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La fusion nucléaire permet de faire « briller » les étoiles. Crédits : NASA/GSFC/SDO

Les exemples de ITER et SPARC

ITER (International Thermonuclear Experimental Reactor) et SPARC (Soonest / Smallest Private-Funded Affordable Robust Compact) sont deux projets majeurs visant à développer et démontrer la faisabilité de la fusion nucléaire en tant que source d’énergie propre et durable.

Le premier est un projet de recherche international lancé en 1985 qui vise à construire le plus grand réacteur de fusion nucléaire au monde basé sur la technologie des tokamaks. Le projet, situé à Cadarache, en France, est soutenu par 35 pays dont les membres de l’Union européenne, les États-Unis, la Russie, la Chine, le Japon, la Corée du Sud et l’Inde.

Le principal objectif d’ITER est de démontrer la faisabilité scientifique et technique de la fusion nucléaire en tant que source d’énergie à grande échelle. ITER est conçu pour produire environ 500 mégawatts de puissance de fusion tout en consommant 50 mégawatts d’énergie pour maintenir la réaction, soit un rendement énergétique dix fois supérieur à l’entrée. ITER devrait être achevé et commencer ses premières expériences dans quelques années. Des expériences de fusion complètes sont attendues pour les années 2030.

SPARC est quant à lui un projet de recherche en fusion nucléaire développé par Commonwealth Fusion Systems (CFS) en collaboration avec le Plasma Science and Fusion Center (PSFC) du Massachusetts Institute of Technology (MIT). Contrairement à ITER, ce projet est principalement financé par des investisseurs privés et vise à développer un réacteur de fusion compact et économiquement viable.

Ce ne sont pas les deux seuls projets en cours. Il en existe beaucoup d’autres. Au cours de ces dernières années, certains d’entre eux ont d’ailleurs fait d’importants progrès dans le domaine. Cependant, plusieurs défis technologiques et scientifiques doivent encore être surmontés avant que cette technologie puisse être largement déployée et commercialisée.

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Le site de construction du plus puissant réacteur à fusion nucléaire du monde, ITER, dans le sud de la France. Crédits : Vinci

Une technologie incroyablement complexe

L’un des principaux défis concerne le confinement du plasma. La fusion nucléaire requiert en effet des températures extrêmement élevées, de l’ordre de plusieurs dizaines millions de degrés Celsius, pour que les noyaux atomiques puissent se combiner. Pour atteindre ces températures, les chercheurs explorent diverses méthodes de chauffage telles que le chauffage par radiofréquence, les faisceaux d’ions neutres et la compression par laser.

À ces températures, la matière se présente alors sous forme de plasma. Un défi majeur est de confiner ce plasma de manière stable et contrôlée. Les dispositifs actuels de confinement magnétique, tels que les tokamaks, doivent encore être optimisés pour maintenir un confinement stable à long terme.

La production et la gestion des matériaux représentent un autre défi important. Les réactions de fusion génèrent en effet des neutrons à haute énergie qui peuvent endommager les matériaux constituant les parois des réacteurs. Ainsi, il est essentiel de développer des matériaux résistants aux dommages induits par les neutrons et capables de résister aux conditions extrêmes à l’intérieur des réacteurs. La gestion des déchets de fusion, bien que moins problématique que celle des déchets de fission, doit également être prise en compte.

La conversion de l’énergie libérée par les réactions de fusion en électricité doit également être optimisée. Les chercheurs étudient actuellement diverses méthodes de conversion thermodynamique pour extraire l’énergie de la fusion de manière plus efficace et économiquement viable.

Par ailleurs, le bilan énergétique de la fusion doit être positif. Autrement dit, la quantité d’énergie produite par la réaction doit être supérieure à l’énergie consommée pour initier et maintenir le processus. Autrement, l’approche n’est pas tout simplement pas viable. Les expériences actuelles de fusion consomment encore plus d’énergie qu’elles n’en produisent, mais là encore des progrès ont été réalisés au cours de ces dernières années.

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Les ingénieurs développent des réacteurs (appelés tokamaks) à l’intérieur desquels ils chauffent des isotopes à plus de cent millions de degrés Celsius pour former un nuage de plasma. Crédits : ITT

La promesse d’un monde décarboné

Malgré ces défis, les chercheurs et les ingénieurs du monde entier travaillent ensemble pour trouver des solutions innovantes et faire de la fusion nucléaire une réalité. Et pour cause, elle pourrait transformer radicalement le secteur de l’énergie et avoir un impact significatif sur le changement climatique. En effet, la fusion nucléaire est une source d’énergie propre, car elle ne produit pas de gaz à effet de serre lors de la production d’électricité.

Par ailleurs, les combustibles utilisés dans les réactions de fusion, comme le deutérium, sont abondants dans l’eau de mer, et le tritium peut être produit à partir du lithium, également relativement abondant. Contrairement aux combustibles fossiles, qui sont limités et en déclin, les ressources en combustible pour la fusion garantiront une source d’énergie durable pour l’avenir.

Dans l’idéal, la fusion nucléaire pourrait être utilisée en complément des sources d’énergie renouvelable. Les réacteurs de fusion pourraient notamment fournir de l’électricité en continu pour combler les lacunes de production des sources d’énergie intermittentes, contribuant ainsi à une transition vers un système énergétique décarboné.