L’analyse des génomes d’individus enterrés dans une tombe collective vieille de 4 500 ans à Bréviandes-les-Pointes, près de Troyes, révèle des découvertes surprenantes sur l’évolution du génome européen. En examinant ces données, les chercheurs ont pu retracer les grandes étapes de sa formation et comprendre l’impact des migrations et des métissages sur les populations néolithiques.
La formation du génome européen
Porteur de nos informations génétiques, le génome humain reflète l’histoire de nos ancêtres. Le génome des Européens actuels s’est constitué sur une période de plus de 40 000 ans, à la suite de diverses migrations et de différents mélanges de populations.
Initialement, l’Europe était habitée par des chasseurs-cueilleurs. Il y a environ 8 000 ans, des agriculteurs venus d’Anatolie et de la région égéenne, descendants de ceux qui ont inventé l’agriculture et la domestication animale, ont migré vers l’Europe. Ces agriculteurs du Néolithique se sont mélangés aux chasseurs-cueilleurs locaux tout en apportant au passage une contribution significative au génome de nombreux Européens d’aujourd’hui.
À la fin du Néolithique, il y a entre 5 000 et 4 000 ans, des populations nomades des steppes pontiques (au nord de la mer Noire) ont par ailleurs migré vers l’Europe. Ces nomades ont alors introduit de nouvelles composantes génétiques qui ont perduré jusqu’à nos jours. Ces vagues de migrations successives ont ainsi façonné le génome complexe des Européens modernes.
Découvertes à Bréviandes-les-Pointes
Ces dynamiques de migrations et de métissages se reflètent clairement dans les découvertes faites à Bréviandes-les-Pointes. L’étude des génomes des individus de cette tombe collective vieille de 4 500 ans révèle en effet des informations précieuses sur leurs origines et leurs relations.
Parmi les individus se trouvaient une femme de plus de 60 ans, son fils adulte, son petit-fils, la mère du petit-fils, une jeune femme, son nouveau-né et un enfant non apparenté aux autres. Les analyses ont montré que les femmes possédaient une composante génétique caractéristique des populations du sud de la France et du sud-ouest de l’Europe. Cela indique des liens avec des populations éloignées, suggérant des mouvements et des échanges sur de longues distances.
L’homme adulte avait un génome partagé entre les origines néolithiques françaises de sa mère et celles des nomades des steppes de son père. Cette découverte permet d’observer en « temps réel » l’introduction du génome des nomades des steppes dans la population néolithique locale. En reconstituant la partie du génome héritée du père de l’homme adulte, les chercheurs ont en effet pu situer son origine dans le nord-ouest de l’Europe, montrant ainsi les vastes réseaux de migration et de métissage qui existaient à l’époque.
Vagues de métissage et émergence de nouvelles cultures
L’étude à Bréviandes-les-Pointes s’inscrit dans un cadre plus large de recherche sur les métissages entre les populations des steppes et les agriculteurs néolithiques et révèle deux phases significatives au cours du troisième millénaire avant notre ère. La première phase a vu le métissage entre les nomades des steppes et les agriculteurs néolithiques d’Europe orientale et centrale, créant ainsi la culture de la céramique cordée. Cette culture, reconnue pour ses poteries ornées de motifs en cordes, a joué un rôle crucial dans la diffusion d’une nouvelle identité culturelle et génétique à travers l’Europe.
La seconde phase, survenue quelques siècles plus tard en Europe occidentale, a montré une dynamique différente où les hommes migrants se sont principalement accouplés avec les femmes autochtones. Ce processus est illustré par les découvertes à Bréviandes-les-Pointes, ainsi que par l’analyse d’une sépulture à Saint-Martin-la-Garenne. Un homme d’ascendance steppique y était enterré selon les rituels de la culture campaniforme. Cette culture, caractérisée par ses vases campaniformes distinctifs et ses objets associés aux archers, incarne une autre manifestation importante d’intégration culturelle et génétique en Europe.
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En résumé, les découvertes à Bréviandes-les-Pointes mettent en lumière l’impact profond des migrations et des métissages sur la formation du génome européen. Ces événements historiques ont non seulement façonné la diversité génétique, mais aussi enrichi la palette culturelle des Européens modernes, témoignant ainsi de la complexité et de la richesse de notre héritage génétique.
