Des fragments de l’ancienne Mercure pourraient se cacher sur Terre

Mercure diamants

Une équipe de chercheurs suggère que les aubrites (un groupe de petites météorites connu depuis environ 150 ans) pourraient être des morceaux de l’ancienne Mercure. Ces restes protoplanétaires auraient dérivé dans le Système solaire suite à un impact géant.

Mercure intrigue les planétologues. Sa composition est en effet différente des autres planètes rocheuses du Système solaire. Elle apparaît beaucoup trop dense et la majeure partie de la planète est occupée par son noyau. Autrement dit, Mercure s’est vêtue d’aucun manteau épais comme la Terre et personne ne sait vraiment pourquoi.

Une hypothèse suggère que la planète a été beaucoup plus grande (peut-être deux fois sa masse actuelle ou plus). Il y a des milliards d’années, cette protoplanète aurait alors pu être touchée par un gros objet, dépouillant ses couches externes. Bien qu’il s’agisse d’une bonne idée, nous ne disposons d’aucune preuve directe capable de témoigner d’une telle histoire. Toutefois, certains chercheurs pensent avoir trouvé quelque chose.

Selon Camille Cartier et son équipe, de l’Université de Lorraine en France, des morceaux de cette proto-Mercure pourraient en effet se cacher dans des musées et autres collections de météorites. Leurs travaux ont été présentés en mars dernier à la Conférence sur les sciences lunaires et planétaires de Houston.

L’origine des aubrites

Près de 70 000 météorites ont déjà été recueillies dans le monde entier. La plupart proviennent d’astéroïdes éjectés de la ceinture principale. Environ 500 proviennent de la Lune et un peu plus de 300 viennent de Mars. En revanche, les météorites confirmées issues des planètes les plus intérieures de notre système, Vénus et Mercure, manquent à l’appel. Du moins, c’est ce que l’on pensait.

Parmi les collections de météorites se trouvent un type rare de roche spatiale appelée aubrites, connues depuis 1836. Ces objets sont de couleur pâle, contiennent de petites quantités de métal, sont pauvres en oxygène et semblent s’être formés dans un océan de magma. On en dénombre environ 80 sur Terre. De par leur composition, ces roches ont souvent été présentées comme des analogues de l’ancienne Mercure.

Jusqu’à présent cependant, les scientifiques se sont arrêtés avant de dire qu’il s’agissait en réalité de morceaux de Mercure. Pour la plupart, il ne s’agirait de rien d’autre que des restes d’un groupe d’astéroïdes de la ceinture appelés astéroïdes de type E.

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La première aubrite découverte a été trouvée en France en 1836. Crédits : Natural History Museum de Londres.

Un long chemin avant d’arriver sur Terre

Partant de l’hypothèse qu’un énorme objet soit entré en collision avec la jeune Mercure, Camille Cartier et son équipe ont calculé qu’une grande quantité de matière aurait pu être projetée dans l’espace suite à l’impact (environ un tiers de la masse de la planète). Une petite quantité de ces débris aurait été poussée par le vent solaire dans ce qui est maintenant la ceinture d’astéroïdes, formant les astéroïdes de type E.

Là, ces objets seraient restés pendant des milliards d’années, se brisant parfois les uns contre les autres. Certains de ces fragments auraient alors pu être éjectés pour finir leur voyage sur Terre sous forme de météorites aubritiques. Leur hypothèse suggère plus précisément que les aubrites seraient issues des parties les moins profondes du manteau de la proto-Mercure. Si cela est vrai, cela signifierait que nous avons eu des morceaux de Mercure (bien qu’une version plus ancienne de la planète) cachés dans nos tiroirs depuis plus de 150 ans.

Certains spécialistes n’ont pas été convaincus par ces résultats. Néanmoins, ces derniers pourraient être mis à l’épreuve prochainement. Une mission spatiale conjointe eurojaponaise appelée BepiColombo est en effet actuellement en chemin pour Mercure. La mission doit arriver sur place en décembre 2025.

Le Dr Cartier a d’ailleurs présenté son idée à un groupe de scientifiques de BepiColombo il y a plusieurs semaines. Ces derniers envisageraient de rechercher des preuves de nickel à la surface de Mercure, ce qui permettrait de relier de manière plus concluante la planète aux aubrites collectées.