Un fossile bouleverse nos idées sur l’origine des oiseaux modernes

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Illustration des derniers oiseaux à dents connu, Janavis finalidens. Crédit : Phillip Krzeminski

Des fragments fossilisés d’un squelette contribuent à renverser l’une des hypothèses les plus anciennes sur les origines des oiseaux modernes. Des chercheurs ont en effet découvert que l’une des principales caractéristiques du crâne qui caractérise 99 % des oiseaux modernes (un bec mobile) a évolué avant l’extinction massive qui a tué tous les grands dinosaures, il y a 66 millions d’années. Les détails de l’étude sont publiés dans Nature.

Mâchoires anciennes et modernes

Tous les oiseaux d’aujourd’hui peuvent être classés en deux groupes en fonction de la disposition de leurs os du palais. Les autruches, les émeus et leurs proches sont classés dans le groupe des paléognathes dits à « mâchoires anciennes ». Comme chez les humains, les os de leur palais sont fusionnés en une masse solide. Les autres sont classés dans le groupe des néognathes, dits à « mâchoires modernes ». À l’inverse, les os de leur palais sont reliés par une articulation mobile, ce qui facilite grandement la construction des nids, le toilettage ou encore la cueillette de nourriture.

Nous devons ces deux groupes au biologiste britannique Thomas Huxley qui, dès la fin des années 1860, considéra que la configuration des mâchoires « anciennes » était la condition d’origine des oiseaux modernes après l’extinction du Crétacé, tandis que les mâchoires « modernes » étaient apparues plus tard. Depuis, cette hypothèse n’a jamais vraiment été remise en cause, principalement en raison du manque de fossiles de palais disponibles.

Revenons maintenant à notre oiseau, nommé Janavis finalidens. Cet animal primitif, l’un des derniers oiseaux à dents à avoir jamais vécu, aurait évolué il y a environ 66,7 millions d’années, soit à la toute fin du Crétacé, juste avant l’extinction.

Son fossile a été trouvé dans une carrière de calcaire près de la frontière belgo-néerlandaise dans les années 1990. Il fut ensuite étudié pour la première fois en 2002. Cependant, ses restes étant enfermés dans la roche, les scientifiques de l’époque ne pouvaient baser leurs descriptions que sur ce qu’ils pouvaient voir de l’extérieur. Leurs analyses étaient donc limitées. Plus récemment, une équipe de l’Université de Cambridge a toutefois entrepris de réévaluer le fossile avec les techniques modernes permettant de voir à travers la roche.

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Illustration des derniers oiseaux à dents connus, Janavis finalidens. Crédits : Phillip Krzeminski

Un bec mobile

Très vite, les chercheurs ont remarqué une certaine ressemblance entre l’un des os du crâne de cet oiseau, que l’on supposait auparavant être un os d’épaule, avec celui d’une dinde. En les comparant, ces deux ossements étaient effectivement quasi identiques. Après des examens plus approfondis, il est alors apparu que d’après la disposition des os de son palais, cet oiseau primitif avait bel et bien un bec mobile et adroit presque indiscernable de celui de la plupart des oiseaux modernes.

Ce fossile montre que le bec mobile, que nous avions toujours pensé postérieur à l’origine des oiseaux modernes, a en fait évolué avant l’existence des oiseaux modernes. Il apparaît donc également que l’état non fusionné des « mâchoires modernes » a évolué avant l’état des « mâchoires anciennes » qui caractérisent les autruches et leurs proches. Pour une raison inconnue, les palais fusionnés des autruches et de leurs parents ont ainsi évolué à un moment donné après l’établissement des oiseaux modernes.

Qu’est-il arrivé à Janavis ? Comme les grands dinosaures et autres oiseaux à dents, il n’a pas survécu à l’extinction massive de la fin du Crétacé. Les chercheurs disent que cela peut être dû à sa grande taille : l’animal pesait environ 1,5 kg et avait la taille d’un vautour moderne.