De rĂ©cents travaux ont montrĂ© que les fumĂ©es issues des feux de forĂȘt avaient un impact considĂ©rable sur les nuages bas en Asie du Sud, une rĂ©gion sensible qui abrite prĂšs de 300 millions de personnes. Les rĂ©sultats ont Ă©tĂ© publiĂ©s en accĂšs libre dans la revue scientifique Nature Communications.
Les formations nuageuses dĂ©pendent de façon fondamentale des innombrables particules en suspension dans notre atmosphĂšre. En effet, pour se former, les gouttes dâeau et les cristaux de glace nĂ©cessitent la prĂ©sence dâun embryon particulaire, aussi appelĂ© aĂ©rosol, Ă partir duquel le processus de nuclĂ©ation va pouvoir dĂ©buter. Cependant, en raison de la complexitĂ© et de la multitude dâinteractions entre les aĂ©rosols et les nuages, diverses questions et incertitudes persistent encore Ă lâheure actuelle.
Mise en Ă©vidence dâune influence forte des incendies sur les nuages bas
Dans une Ă©tude rĂ©cente, des chercheurs ont prĂ©cisĂ© le rĂŽle que pouvaient avoir les feux de forĂȘt sur les nuages bas. Ătant donnĂ© lâimportante quantitĂ© dâaĂ©rosols libĂ©rĂ©e rĂ©gionalement au moment des incendies, on supposait une rĂ©action de la couverture nuageuse. En recoupant observations et simulations numĂ©riques sur un domaine gĂ©ographique de 500 000 kilomĂštres carrĂ©s localisĂ© en Asie du Sud, les scientifiques ont dĂ©sormais dĂ©montrĂ© que les particules Ă©mises augmentaient trĂšs nettement la quantitĂ© de nuages bas entre lâhiver et le printemps.

Avec ses quelque 270 millions de personnes, la rĂ©gion dâĂ©tude constitue un domaine sensible en termes dâimpacts et de consĂ©quences. Non seulement les fumĂ©es d’incendies sont frĂ©quentes, mais leur influence sur les nuages bas peut entraĂźner des pertes socio-Ă©conomiques considĂ©rables, en rĂ©duisant par exemple la production agricole ou la gĂ©nĂ©ration dâĂ©nergie photovoltaĂŻque. Il ne sâagit donc pas uniquement de considĂ©rations mĂ©tĂ©orologiques ou climatiques. NĂ©anmoins, comment les particules Ă©mises par les incendies en viennent-elles Ă favoriser la prĂ©sence de nuages bas de type stratus ou stratocumulus ?
Une interaction synergique entre les aérosols, le rayonnement solaire et la circulation de mousson
Il apparaĂźt que lâeffet principal tient Ă lâinteraction entre la couche dâaĂ©rosols et le rayonnement solaire. Lâabsorption de ce dernier par les particules de suie conduit Ă un rĂ©chauffement en altitude et, en contrepartie, Ă un refroidissement en surface. La prĂ©sence de ces anomalies de tempĂ©rature modifie le rĂ©gime de vent de sorte Ă amener un surplus dâhumiditĂ© depuis l’ocĂ©an et provoque une stabilisation de l’atmosphĂšre, deux Ă©lĂ©ments favorables aux nuages bas. Cet effet est renforcĂ© par la prĂ©sence de montagnes, lesquelles favorisent le soulĂšvement et le blocage des nuages en amont.
« Bien que de nombreuses Ă©tudes se soient concentrĂ©es sur l’interaction aĂ©rosols-nuage, nous constatons que l’effet aĂ©rosols-rayonnement, en particulier celui des particules de suie absorbantes, joue un rĂŽle dominant sur l’augmentation des nuages bas en Asie du Sud-Est », souligne Yafang Cheng, l’un des coauteurs de lâĂ©tude. « Cela confirme notre hypothĂšse rĂ©cente selon laquelle les interactions aĂ©rosols-nuage ont tendance Ă saturer aux forts taux d’aĂ©rosols, alors que la force des interactions aĂ©rosols-rayonnement continue d’augmenter et joue un rĂŽle plus important dans les Ă©pisodes et rĂ©gions trĂšs polluĂ©s ».