Les femmes, plus à risque que les hommes de mourir de complications après une chirurgie cardiaque

équipe de médecins chirurgiens effectue une opération de chirurgie cardiaque
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Les progrès de la médecine et de la chirurgie ont considérablement amélioré les taux de survie et de récupération des patients, mais il persiste des inégalités troublantes dans les soins prodigués en fonction du sexe et notamment certaines différences de traitement préoccupantes entre hommes et femmes qui peuvent influencer les résultats post-opératoires. C’est en tout cas ce que démontre une étude qui montre que les femmes sont davantage exposées à des complications graves et à un risque de décès accru après une chirurgie cardiovasculaire. Après une étude en 2018 qui montrait que les femmes seraient alors plus susceptibles de mourir d’une crise cardiaque si leur médecin est un homme, une question se pose : comment expliquer ces disparités dans la qualité des soins reçus.

Des disparités criantes dans le traitement des complications post-chirurgicales chez les femmes

Selon une nouvelle étude, les complications qui surviennent après une intervention chirurgicale sont plus souvent sous-reconnues et sous-traitées chez les femmes que chez les hommes, ce qui entraîne des taux de mortalité plus élevés. Ces complications, telles que les crises cardiaques et les infections, sont souvent détectées trop tardivement chez elles, ce qui entraîne un risque accru de décès, une situation alors décrite comme un simple ‘échec à sauver’ par les médecins.

Pour en venir à cette conclusion inquiétante, l’étude, publiée le 16 octobre dans le journal JAMA, s’appuie ici sur les dossiers médicaux de plus de 863 305 patients qui ont subi des interventions chirurgicales à haut risque entre octobre 2015 et février 2020. Toutes ces interventions concernaient le cœur ou les vaisseaux sanguins (réparations d’anévrismes, pontages coronariens ou encore remplacements de valves cardiaques). Environ 15 % des patients ont connu des complications après leur opération dans des taux tout à fait similaires pour les hommes et les femmes. Cependant, près de 11 % des femmes sont décédées des suites de complications contre 8,6 % des hommes.

Les chercheurs ont conclu que cette différence résulterait de retards dans la reconnaissance et le traitement des complications féminines dangereuses qui incluaient des crises cardiaques, des caillots sanguins dans les poumons, des insuffisances rénales, des insuffisances pulmonaires, des pneumonies, des hémorragies ainsi que des infections au niveau du site chirurgical. Le Dr Mario Gaudino, chirurgien cardiaque au Weill Cornell Medical Center et au New York Presbyterian Hospital, non impliqué dans la recherche, a décrit cette étude comme « un signal d’alarme » face aux disparités après des interventions chirurgicales majeures.

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Quels sont les facteurs potentiels à l’origine de ces disparités ?

Les résultats de l’étude révèlent l’ampleur de ce problème systémique. Comme le souligne la Dre Catherine Wagner, chirurgienne cardiaque à l’Université du Michigan et auteure principale de l’étude, « cela suggère qu’un problème systémique contribue à la sous-reconnaissance et au sous-traitement des complications postopératoires chez les femmes ».

L’étude n’identifie pas de facteurs déterminants de cette disparité, mais les recherches antérieures montrent que les femmes ont tendance à subir ces interventions à un âge plus avancé que les hommes et qu’elles présentent alors davantage de comorbidités. Toutefois, ces facteurs ne suffisent pas à expliquer la différence de mortalité observée, d’autant que les taux et les types de complications sont similaires entre les deux sexes. Le Dr Andrei Churyla, chirurgien cardiaque au Northwestern Medical Group à Chicago, observe qu’un biais inconscient pourrait jouer un rôle : « il y a une tendance à minimiser la douleur des femmes, ce qui peut retarder, voire empêcher un diagnostic et un traitement adéquats. »

Le Dr Gaudino ajoute que « le corps féminin reste mal compris par les médecins » et que les critères diagnostiques pour les complications reposent souvent sur des données masculines sans tenir compte des différences physiologiques de base entre les sexes.

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Des changements sources d’espoir

Des efforts déployés depuis quelques années pourraient aider à combler le manque de connaissances et mieux comprendre les spécificités féminines, surtout en matière de chirurgie cardiovasculaire. « Je pense qu’il faut constamment se rappeler que les femmes sont différentes des hommes », souligne la Dre Brittany Zwischenberger, chirurgienne cardiaque chez Duke Health en Caroline du Nord.

« Nos recherches actuelles sur le sexe et le genre devraient, espérons-le, aboutir à des approches chirurgicales adaptées et à un suivi postopératoire plus personnalisé pour réduire les disparités. Mais vraiment, cette [étude] est une opportunité d’améliorer les soins postopératoires pour tous les patients », conclut-elle.

Retrouvez l’étude sur ce lien.