Faire marcher des poissons pour comprendre l’évolution

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Il y a environ 400 millions d’années, les premiers tétrapodes commencèrent à sortir la tête de l’eau. Ces animaux à quatre pattes dont les reptiles, amphibiens, oiseaux et mammifères sont les représentants actuels ont été les pionniers de l’exploration terrestre, grâce à leur physiologie toute particulière ; une adaptation à un milieu aquatique pauvre en oxygène a en effet poussé les tétrapodes à développer des poumons primitifs, et a permis la colonisation des terres émergées.
C’est pour observer des mécanismes évolutifs aussi fondamentaux qu’Emily Standen et d’autres chercheurs se sont penchés sur le cas du Bichir, un poisson doté de caractéristiques similaires aux tétrapodes fossiles.

Le Bichir du Sénégal fait partie des Clastidiens, qui regroupent des poissons osseux dotés de poumons en plus de branchies, et de nageoires pectorales très développées. Ces esquisses de pattes autorisent ces animaux à se promener tranquillement sur les rives de la vallée du Nil où ils se cantonnent.

Le 27 août, Emily standen, chercheur en physiologie comparée, a publié dans la revue Nature les résultats d’une étude de 8 mois menée sur 149 Bichirs : 111 d’entre eux furent placés dans un vivarium disposant de quelques millimètres d’eau, tandis que les 38 restants rejoignaient un aquarium. Le but de l’expérience : déterminer comment l’environnement influence le développement de caractéristiques déjà présentes, en mettant en évidence la notion de plasticité de croissance.

Observer des mécanismes vieux d’un demi-milliard d’années

Les résultats n’ont pas déçu les chercheurs : Les bichirs élevés « hors de l’eau » montraient des déplacements plus cohérents et assurés à l’air libre que leurs congénères nageurs, en relevant davantage la tête et en plaçant mieux leurs nageoires.
Trina Du, autre auteur de l’étude, a également remarqué des modifications anatomiques importantes chez le premier groupe de poissons : « Leur squelette pectoral a changé, il est devenu plus allongé avec des liens plus forts à travers le torse. Probablement pour augmenter le soutien lors des déplacements, et réduire le contact avec le crâne afin de permettre une plus grande liberté de mouvement entre la tête et le cou. »
Ces changements rappellent fortement ceux observés chez les fossiles de tétrapodes primitifs, et permettent à la communauté scientifique d’en comprendre davantage sur l’influence du milieu dans les processus évolutifs, ainsi que sur les débuts de la vie hors de nos océans.

Sources : sciences et avenir, science mag, Nature