Pour explorer d’autres mondes, l’IA va devoir agir « seule »

Crédits : NASA

L’un des principaux freins de l’utilisation de robots dans le domaine de l’exploration spatiale à toujours été leur incapacité à prendre des décisions intuitives, même créatives, aussi efficacement que les humains peuvent le faire. Les progrès récents dans intelligence artificielle (IA) promettent de réduire cet écart rapidement. Sans quoi nous serons aveugles.

Si notre propre planète nous demeure encore inconnue, l’Homme ne cesse d’être curieux et ne peut finir un travail avant d’en commencer un autre. Ainsi vont les choses, ainsi va la Force. C’est pourquoi nous recherchons d’autres mondes, toujours plus loin, allant même jusqu’à planifier des missions dont la technologique nous échappe encore. Et pour ce faire, nous aurons besoin d’aide. Qu’il s’agisse des grottes souterraines de Mars ou des sources hydrothermales sous les eaux glacées d’Europe, la lune de Jupiter, nous ne pourrons y aller seuls dans un avenir prévisible. Ces rôles seront ainsi probablement remplis par des robots et sous-marins quasi autonomes qui pourront résister à des conditions hostiles et mener des expériences scientifiques importantes.

Lorsque Steve Chien reprit la section Intelligence artificielle du Jet Propulsion Laboratory de la NASA au milieu des années 1990, une IA sophistiquée ressemblait plus à de la science-fiction qu’à quelque chose qui devait jouer un rôle crucial dans le succès de la NASA. La mission Mars 2020 de la NASA en aura décidé autrement, et l’homme compte bien faire de la technologie pensante un maillon indispensable des plus grandes missions de l’agence spatiale américaine. Le chercheur et son équipe sont aujourd’hui à l’avant-garde du développement d’une nouvelle classe de rover beaucoup plus avancée que tout autre véhicule ayant parcouru la surface ocre de la planète rouge. Les rovers Mars 2020 auront en effet une grande latitude quant à la sélection de leurs propres cibles visant à l’étude et l’expérimentation de preuves de vie passée.

Mars
Crédits : Pixabay

Interrogé par le magazine Scientific American, le chercheur s’est notamment attardé sur les prochains défis de la NASA quant à la mise au point de systèmes capables de travailler seuls. « Nous devons être sûrs que l’IA fonctionne bien, tout le temps », a-t-il expliqué. « Cela ne signifie pas que vous pouvez prédire exactement ce qu’elle va faire, mais vous voulez échapper aux travaux de microgestion. Vous voulez que l’IA travaille plus étroitement en tant qu’apprenti ou assistant du scientifique capable de prendre des décisions, et non en tant que simple machine, parce que la machine doit être microgérée ».

Concernant la prochaine mission Mars 2020, l’IA sera notamment déterminante dans trois domaines. Le premier est la conduite autonome des rovers. Vous pouvez dire aux rovers où aller et comment y aller, ou simplement leur dire de conduire et les laisser faire. Le deuxième domaine concerne la science pure. Les capacités de ciblage seront bien meilleures et porteront sur davantage d’instruments qui fourniront des images, des analyses de composition chimique et de minéralogie. Troisièmement, les rovers Mars 2020 auront également un système d’ordonnancement plus sophistiqué qui leur permettra d’être plus dynamiques. Si le travail est en avance ou en retard par rapport au planning, un mobile ajustera automatiquement son itinéraire, ce qui pourrait améliorer la productivité du rover. Ces avancées seront notamment déterminantes au cœur des grottes martiennes. La communication avec la Terre sera en effet beaucoup plus compliquée. L’IA permettra de coordonner, cartographier et d’explorer autant aussi efficacement que possible en un temps très limité.

Europe
Crédits : NASA/JPL-Caltech/SETI Institute

Mars n’est qu’une étape. Le test ultime de l’IA dans l’espace sera une mission de plus longue durée. Un submersible sur Europe, par exemple, devra survivre seul pendant des années ayant potentiellement un contact avec la Terre seulement tous les 30 jours. Ce n’est ici évidemment rien comparé à une mission interstellaire, où le vaisseau spatial fonctionnera complètement de manière autonome. Il faudrait en effet 9 ans pour communiquer avec un vaisseau posté au large de Proxima Centauri – l’étoile la plus proche. Avec un tel retard dans les communications, le vaisseau spatial se retrouve donc tout seul.

Nous aurons pour de telles missions besoin d’une IA incroyable, et de croiser les doigts. Celle-ci devra en effet supporter des années de voyage en solo, mais aussi être en mesure de faire face à des circonstances changeantes et extrêmement imprévisibles. Des variations de température aux objets cosmiques, quelle que soit la technologie avancée sur ces objets, ils devront utiliser des niveaux de créativité et d’intuition semblables à ceux de l’humain pour passer l’ultime test.

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