Des étoiles « monstrueuses » localisées très tôt dans l’univers

étoiles uniu
Les amas globulaires comme celui-ci contiennent des centaines de milliers à des millions d'étoiles, dont certaines des plus anciennes de l'univers. Crédits : NASA Goddard

S’appuyant sur la puissance du James Webb Telescope, une équipe annonce avoir identifié plusieurs étoiles supermassives dans le très jeune univers. Nés à peine 440 millions d’années après le Big Bang, ces « monstres célestes » pourraient nous éclairer sur la façon dont notre univers a été ensemencé d’éléments lourds. Les détails de l’étude sont publiés dans la revue Astronomy and Astrophysics.

Les amas globulaires sont comme des fenêtres sur le passé

L’une des principales missions du James Webb Telescope est d’observer les premières étoiles et galaxies qui se sont formées après le Big Bang. Cependant, en raison de l’expansion de l’univers, la lumière provenant de ces objets est étirée vers le rouge, ce qui la déplace vers des longueurs d’onde plus grandes. L’observatoire a donc été spécialement conçu pour détecter cette lumière infrarouge.

Dans le cadre d’une récente étude, une équipe de l’université de Genève, en Suisse, a utilisé le JWT pour analyser quelques-unes des plus anciennes étoiles de l’univers nichées dans d’anciens amas globulaires.

Pour rappel, les amas globulaires sont des ensembles d’étoiles généralement âgées de plus de dix milliards d’années. Ils en contiennent des centaines de milliers, voire des millions, toutes liées gravitationnellement ensemble. Notez cependant que, malgré leur grande taille en termes de nombre d’étoiles, les amas globulaires sont relativement compacts, avec des diamètres typiquement de l’ordre de quelques dizaines à quelques centaines d’années-lumière.

Nous savons par ailleurs que les étoiles au sein des amas globulaires ont des caractéristiques similaires en matière de composition chimique et d’âge. Elles sont généralement pauvres en métaux (éléments autres que l’hydrogène et l’hélium), ce qui indique qu’elles se sont formées à une époque où l’univers était encore jeune et moins abondant en éléments lourds.

Ainsi, l’analyse de ces structures fournit des informations précieuses sur la formation et l’évolution des étoiles, et plus généralement des galaxies.

amas globulaire étoiles
L’image de NGC 6397. Crédits : NASA, ESA et T. Brown et S. Casertano (STScI).

Des milliers de « monstres célestes »

À leur grande surprise, en analysant plusieurs centaines de ces amas, les astronomes ont identifié de nombreuses étoiles gigantesques. Certaines étaient en effet des milliers de fois plus massives que le Soleil (jusqu’à 10 000 fois).

Identifier ces « monstres cosmiques » n’a pas été simple. Les étoiles plus grandes, plus brillantes et plus chaudes ont en effet une courte durée de vie (environ deux millions d’années). Cela signifie qu’elles ont depuis longtemps disparu dans des explosions extrêmement violentes appelées hypernovas.

De ce fait, il ne reste de ces étoiles que des traces indirectes. Pour les repérer, les chercheurs ont entraîné la caméra infrarouge du JWT sur la galaxie GN-z11. Située à 13,3 milliards d’années-lumière de la Terre, c’est l’une des galaxies les plus lointaines et les plus anciennes jamais découvertes.

Nous savons par ailleurs que différents produits chimiques absorbent et émettent de la lumière à différentes fréquences. En décomposant la lumière provenant de différents amas globulaires trouvés sur GN-z11, les astronomes ont alors découvert que certaines de ces étoiles étaient entourées de niveaux élevés d’azote. Or, nous savons que la forte présence d’azote ne peut s’expliquer que par la combustion de l’hydrogène à des températures extrêmement élevées que seul le cœur des étoiles supermassives peut atteindre.

Mystérieusement, certaines des étoiles de ces amas auraient des proportions d’éléments très différentes (oxygène, azote, sodium et aluminium), et ce, malgré le fait qu’elles se soient formées à peu près au même moment et à partir des mêmes nuages ​​de gaz et de poussière. Les astronomes pensent que cette variété pourrait justement s’expliquer par l’existence de ces étoiles supermassives. Ces géantes auraient brûlé leur carburant à des températures beaucoup plus élevées, produisant ainsi des éléments plus lourds qui ont ensuite « pollué » des étoiles infantiles plus petites.