Géo-ingénierie marine : les États-Unis envisagent un programme de recherche majeur

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Crédits : Doug Hurley

Un rapport scientifique récent des Académies Nationales des Sciences, de l’Ingénierie et de la Médecine (États-Unis) a recommandé un projet de recherche visant à étudier en détail la façon dont l’océan pourrait être exploité dans le but d’augmenter la séquestration de CO2 et, ce faisant, d’atténuer le changement climatique anthropique.

Une des manières de lutter contre le réchauffement de la planète consiste à intervenir de façon délibérée sur le climat afin d’en limiter la dérive. On parle à ce titre de géo-ingénierie. Parmi les nombreuses techniques proposées, on trouve l’exploitation artificielle des océans de manière à augmenter l’absorption de dioxyde de carbone (CO2) et diminuer ainsi sa concentration dans l’atmosphère.

Les États-Unis, leader de la recherche sur la géo-ingénierie ?

Compte tenu de l’immense réservoir que représente l’océan, la méthode peut s’avérer très efficace. Toutefois, des questions continuent à se poser en ce qui concerne les risques éventuels, les divers angles d’approche ou encore la mesure précise des bénéfices. Pour ces raisons, un rapport scientifique produit par les États-Unis a récemment recommandé un programme de recherche dédié qui devrait se dérouler sur dix ans et dont le budget s’élèverait à quelque 125 millions de dollars.

« Toutes les approches terrestres ont des limites, il est donc important d’évaluer la possibilité d’utiliser également les océans », indique Romany Webb, coauteur du rapport. « Il est important de noter que le rapport identifie non seulement les questions scientifiques clés auxquelles il faut répondre, mais également les questions sociales, juridiques, réglementaires et politiques ».

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Représentation schématique des six techniques discutées dans le rapport publié par les États-Unis d’Amérique. Crédits : Scott C. Doney & coll. 2021.

Un éventail de pistes plus ou moins coûteuses, plus ou moins risquées

Afin de stimuler l’absorption de CO2 par l’océan, six pistes sont avancées dans le document. Il s’agit de la fertilisation nutritive, la culture d’algues, la restauration des écosystèmes, l’augmentation de l’alcalinité des eaux, l’électrochimie, et enfin les plongées et remontées d’eaux artificielles. Notons que pour la plupart de ces méthodes, le carbone n’est pas capturé par les eaux de surface elles-mêmes, mais par la vie marine. En sédimentant, les organismes le transfèrent en effet ensuite vers l’océan profond et la Terre solide.

En ce qui concerne les coûts de recherche, ils se situent entre 100 et plus de 300 millions de dollars selon la technique considérée. La plus onéreuse est celle basée sur l’électrochimie et la moins onéreuse, celle faisant appel à la remontée et la plongée des eaux. Notons que les risques associés à chaque méthode peuvent différer de plusieurs ordres de grandeur, les plus faibles étant ceux liés à la restauration de l’écosystème. Il est néanmoins nécessaire de considérer d’un même regard l’efficacité, le coût et les inconvénients pour évaluer objectivement le rapport bénéfice/risque.

« Les stratégies d’élimination du dioxyde de carbone des océans sont déjà discutées par les scientifiques, les organisations non gouvernementales et les entrepreneurs en tant que stratégies potentielles de réponse climatique », relate Scott C. Doney, auteur principal du rapport. « À l’heure actuelle, la société et les décideurs politiques ne disposent pas des informations dont ils ont besoin pour évaluer les impacts et les compromis ». Il s’agit d’un fossé que ce rapport vise à combler en appelant à la mise en œuvre d’un programme de recherche dédié.