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Et si votre brosse à dents vous protégeait aussi du cancer le plus redouté ?

On savait déjà qu’un bon brossage limitait les caries et les maladies des gencives. Mais de nouvelles recherches révèlent un lien inattendu : certaines bactéries présentes dans notre bouche pourraient influencer directement le risque de développer un cancer du pancréas, l’un des plus meurtriers.

Un cancer silencieux et redoutable

Le pancréas, cet organe discret niché derrière l’estomac, joue un rôle essentiel dans la digestion et la régulation de la glycémie. Malheureusement, quand une tumeur s’y développe, elle reste longtemps indétectable. Les symptômes apparaissent souvent à un stade avancé, ce qui explique un taux de survie à cinq ans d’à peine 13 %. Déceler des signaux précoces de risque est donc un enjeu majeur pour les chercheurs.

Quand la bouche parle pour le pancréas

Des épidémiologistes de l’Université de New York se sont intéressés à un suspect inattendu : le microbiome buccal, c’est-à-dire l’ensemble des microbes qui vivent dans notre bouche. Grâce à l’analyse d’échantillons de bains de bouche collectés auprès de centaines de milliers de volontaires âgés de 50 à 70 ans, les chercheurs ont identifié des profils microbiens associés au développement ultérieur d’un cancer du pancréas.

En comparant les données de 445 patients ayant déclaré la maladie avec celles de 445 témoins en bonne santé, ils ont mis en évidence une tendance frappante : certaines espèces de bactéries et de champignons étaient beaucoup plus fréquentes chez les futurs malades.

Des microbes alliés… et des microbes à risque

Parmi les micro-organismes mis en cause, trois bactéries retiennent particulièrement l’attention : Porphyromonas gingivalis, Eubacterium nodatum et Parvimonas micra. Toutes trois sont connues pour leur implication dans les maladies parodontales. À celles-ci s’ajoute un champignon habituellement présent sur la peau et dans l’intestin, Candida tropicalis. Leur présence élevée dans la bouche a été associée à un risque significativement accru de diagnostic de cancer du pancréas.

Mais la découverte ne s’arrête pas là. D’autres microbes, au contraire, semblaient corrélés à une diminution du risque. Cela suggère que l’équilibre global du microbiome buccal joue un rôle crucial, et que certains micro-organismes pourraient exercer un effet protecteur.

cancer prostate
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Comment les bactéries buccales atteignent-elles le pancréas ?

Les chercheurs avancent une hypothèse : les microbes buccaux pourraient voyager par le système digestif, véhiculés par la salive, jusqu’à l’organe cible. Une fois installés, ils pourraient favoriser une inflammation chronique ou perturber l’environnement cellulaire, créant des conditions propices à la formation de tumeurs.

Il est toutefois important de préciser que corrélation ne signifie pas causalité. Ces micro-organismes ne sont pas nécessairement la cause directe du cancer, mais leur présence pourrait constituer un marqueur de risque précieux.

Vers un dépistage précoce grâce à la salive ?

Aujourd’hui, l’un des plus grands défis de l’oncologie est de diagnostiquer le cancer du pancréas suffisamment tôt pour agir efficacement. Si le profil du microbiome buccal permettait d’identifier les personnes à haut risque, il deviendrait un outil de dépistage simple, non invasif et accessible.

Comme le souligne l’épidémiologiste Jiyoung Ahn, « en profilant les populations bactériennes et fongiques dans la bouche, les oncologues pourraient cibler ceux qui ont le plus besoin d’un suivi rapproché ». L’équipe de recherche prévoit d’élargir ses travaux en explorant également le rôle des virus dans cette dynamique.

Une raison de plus de soigner son hygiène bucco-dentaire

Ces découvertes renforcent l’idée que la santé buccale ne se limite pas à l’esthétique du sourire. Brosser ses dents deux fois par jour, utiliser du fil dentaire et consulter régulièrement son dentiste restent des gestes essentiels pour prévenir les maladies parodontales. Mais ils pourraient aussi, indirectement, protéger contre un cancer particulièrement agressif.

Les détails de l’étude sont publiés dans la revue JAMA.

Brice Louvet

Rédigé par Brice Louvet

Brice est un journaliste passionné de sciences. Ses domaines favoris : l'espace et la paléontologie. Il collabore avec Sciencepost depuis près d'une décennie, partageant avec vous les nouvelles découvertes et les dossiers les plus intéressants.