Vivre dans l’espace détruit les globules rouges des astronautes

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Crédits : Chris Cassidy

Une étude menée auprès de plusieurs astronautes suggère que le corps humain peut détruire plus de 50% de globules rouges en plus lors de séjours longue durée dans l’espace. Ces problèmes d’anémie ne sont pas encore bien compris. Appréhender ce phénomène sera pourtant vital dans le cadre d’une exploration humaine de l’espace.

Nous sommes le fruit de millions d’années d’évolution terrestre. Ainsi, il n’est pas surprenant de constater que les séjours prolongés dans l’espace, qui proposent un environnement très différent, soumettent nos corps à rude épreuve. Comprendre ces défis reste pourtant essentiel si nous voulons nous établir durablement sur la Lune ou sur Mars.

Dysfonctionnement vestibulaire, perte de poids, déplacement ascendant des fluides, déconditionnement cardiovasculaire, l’atrophie musculaire ou encore perte osseuse, la liste des troubles connus est aujourd’hui très longue. De nouvelles recherches ajoutent aux inquiétudes, soulignant comment les voyages dans l’espace peuvent également entraîner une baisse du nombre de globules rouges.

Plus de 54% de globules rouges en plus détruits

Jusqu’à présent, l’anémie spatiale était simplement considérée comme une adaptation rapide aux fluides se déplaçant dans le haut du corps d’un astronaute lors de sa première arrivée dans l’espace. On pensait également que le contrôle des globules rouges revenait à la normale après une dizaine de jours passés dans l’espace. En réalité, c’est un peu plus compliqué.

Dans le cadre de cette étude publiée dans Nature Medicine, des chercheurs de l’Université d’Ottawa ont mesuré les taux de monoxyde de carbone dans des échantillons d’haleine de quatorze astronautes ayant passé six mois à bord de l’ISS au moyen d’un chromatographe en phase gazeuse à haute résolution.

Une molécule de monoxyde de carbone est en effet très souvent produite chaque fois qu’une molécule d’hème, le pigment rouge foncé des globules rouges, est détruite. Ce n’est pas une connexion parfaite, car d’autres processus peuvent également entraîner la production de monoxyde de carbone. Toutefois, les chercheurs soulignent qu’environ 85% du monoxyde de carbone produit par un humain provient de l’hémolyse.

Sur Terre, nos corps créent et détruisent environ deux millions de globules rouges chaque seconde. Or, les résultats de cette nouvelle recherche suggèrent que leur corps peut détruit plus de 54% de globules rouges de plus en milieu de microgravité. Ces conclusions étaient par ailleurs les mêmes pour les femmes et les hommes.

« L’anémie spatiale a toujours été signalée lorsque les astronautes sont revenus sur Terre depuis les premières missions spatiales, mais nous ne savions pas pourquoi« , souligne Guy Trudel, médecin en réadaptation et chercheur à L’Hôpital d’Ottawa. « Notre étude montre qu’en arrivant dans l’espace, davantage de globules rouges sont détruits, et cela pendant toute la durée de la mission de l’astronaute. »

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Image conceptuelle d’un astronaute Artemis marchant sur la surface lunaire. Crédits : NASA

Pas de problème… tant qu’on est dans l’espace

Ces problèmes d’anémie semblent toutefois réversibles. Trois à quatre mois après leur retour sur Terre, les niveaux de destruction de globules rouges commençaient en effet à revenir lentement à la normale. Un an plus tard, la destruction des globules rouges était toutefois encore 30 % plus élevée chez les astronautes.

À bord de la station, aucun effet néfaste n’a par ailleurs été enregistré, car le corps est en apesanteur. Ce manque de globules rouges pourrait en revanche poser problème lors de l’atterrissage sur la Lune ou sur d’autres planètes. L’anémie affecte en effet notre énergie, notre endurance et notre force, ce qui pourrait menacer les objectifs de ces missions.

Le fait que les séjours de longue durée dans l’espace tuent une quantité excessive de globules rouges soulève également plusieurs questions. Par exemple, on ignore encore précisément pourquoi le fait d’être dans l’espace amène le corps humain à détruire les cellules sanguines à un rythme plus rapide. Il y a cependant quelques « coupables » potentiels. Nous savons que l’hémolyse peut se produire dans quatre parties différentes du corps : la moelle osseuse, les vaisseaux sanguins, le foie et la rate. Les chercheurs soupçonnent que la moelle osseuse ou la rate pourraient être les zones à problèmes les plus probables. Cette hypothèse fera l’objet d’une étude prochaine. Par ailleurs, on ignore encore combien de temps le corps humain peut supporter ce taux élevé de destruction et de production de globules rouges.