Entendre des voix : véritable don ou signe de schizophrénie ? Voici ce que dit cette étude

L’expérience de la clairaudience – la capacité d’entendre des voix qui ne proviennent pas du monde extérieur – est un phénomène mystérieux. Souvent perçu comme une capacité surnaturelle, il peut aussi être associé à des troubles mentaux, notamment la schizophrénie. Mais, au-delà de cette dichotomie, qu’en est-il vraiment ? Une étude récente menée par des chercheurs de l’Université de Durham, dirigée par Adam Powell, a mis en lumière l’importance de la perception et des croyances culturelles dans la manière dont les individus interprètent ce phénomène.

Une approche inédite sur la clairaudience

Une étude récente publiée dans la revue Mental Health, Religion & Culture a exploré les raisons pour lesquelles certaines personnes entendent des voix et les interprètent comme des messages spirituels, tandis que pour d’autres, cette expérience peut être associée à des troubles psychiatriques.

Pour ce faire, les chercheurs ont comparé deux groupes distincts : les médiums spirituels, membres de communautés pratiquant le spiritisme, et un groupe témoin constitué de personnes n’ayant jamais vécu d’expériences auditives similaires.

Pour la majorité des médiums spirituels interrogés, les voix étaient perçues comme des messages provenant de l’au-delà. Environ 79 % des participants ont rapporté entendre des voix régulièrement, avec 44,6 % affirmant qu’elles se manifestaient chaque jour. La plupart de ces voix étaient perçues comme venant de défunts ou d’esprits, et elles jouaient un rôle central dans leur pratique spirituelle.

L’étude a aussi révélé que la majorité des médiums déclaraient avoir entendu des voix pour la première fois durant leur enfance. Cette expérience précoce semble être un élément clé dans leur parcours spirituel, car 71 % des médiums ont mentionné que les voix étaient apparues avant même qu’ils ne soient conscients du spiritisme.

En revanche, parmi le groupe témoin composé de personnes n’ayant jamais eu d’expériences similaires, les cas d’audition de voix étaient extrêmement rares. Ce contraste souligne l’importance de l’interprétation contextuelle des voix dans différentes communautés.

Une relation entre croyance et perception des voix

L’étude a révélé une observation cruciale : les médiums spirituels semblent plus enclins à interpréter les voix qu’ils entendent comme faisant partie de leur vie spirituelle, une dimension de leur existence qu’ils intègrent dans leurs croyances. En revanche, dans la population générale, les voix sont souvent perçues comme le signe d’un trouble mental, notamment la schizophrénie. Ces résultats suggèrent que l’interprétation des voix peut être influencée par des croyances culturelles et spirituelles, et non uniquement par des prédispositions neurologiques ou psychiatriques.

Les chercheurs ont également constaté que les médiums spirituels rapportaient des expériences auditives positives, qu’ils ont souvent décrites comme étant « plaisantes » et « bénéfiques », par opposition aux voix souvent perçues comme envahissantes ou perturbantes par les personnes souffrant de troubles mentaux.

L’absorption, une clé de la clairaudience spirituelle ?

L’un des aspects les plus fascinants de cette étude réside dans le concept d’« absorption ». Ce terme désigne la capacité à se concentrer intensément sur des stimuli internes ou externes, comme des pensées ou des images mentales. Selon les chercheurs, les médiums spirituels, ainsi que certains individus ayant vécu des expériences auditives inhabituelles, présentent un trait de personnalité caractérisé par un haut degré d’absorption. Cela pourrait signifier qu’ils sont particulièrement réceptifs à des expériences sensorielles profondes, comme l’audition de voix.

Les chercheurs ont découvert que la tendance à l’absorption est plus marquée chez les médiums spirituels, suggérant que cette capacité pourrait jouer un rôle crucial dans la manière dont ces individus perçoivent et interprètent les voix. Il semble que la prédisposition à l’absorption, combinée à un cadre spirituel spécifique, permet aux médiums de vivre ces expériences de manière moins perturbante et plus significative. Cette approche suggère que la clairaudience n’est pas simplement un phénomène pathologique, mais qu’elle pourrait résulter d’une interaction complexe entre prédispositions psychologiques, croyances personnelles et contextes culturels.

Les voix : un phénomène multifacette

L’un des aspects les plus complexes de l’étude est la question de savoir si les voix entendues par les médiums spirituels sont réellement celles des défunts. Les chercheurs notent que cette question dépasse le cadre de l’étude, mais elle soulève un débat intéressant : les voix sont-elles une manifestation d’un phénomène surnaturel, ou simplement un produit des processus mentaux des individus ?

Il est aussi possible que certaines personnes ayant des tendances à l’absorption vivent des expériences auditives qui, dans des contextes spirituels, sont interprétées comme des messages des morts, mais qui, dans d’autres contextes, pourraient être classées comme des hallucinations. Les contextes culturels et spirituels dans lesquels ces voix sont entendues pourraient ici jouer un rôle crucial dans la manière dont elles sont interprétées et vécues.

Vers une meilleure compréhension des expériences auditives

L’étude conclut que la clairaudience, loin d’être une expérience uniforme, varie profondément selon les croyances culturelles, les prédispositions psychologiques et le contexte spirituel des individus. Plutôt que de considérer les voix comme une simple pathologie mentale, il semble plus pertinent de les appréhender à travers le prisme des croyances spirituelles et de la personnalité des individus qui les expérimentent.

Ces découvertes ouvrent de nouvelles perspectives sur la compréhension de la clairaudience, et permettent d’envisager de nouvelles approches pour ceux qui l’expérimentent, qu’ils soient médiums spirituels ou personnes souffrant de troubles mentaux. En fin de compte, la manière dont nous interprétons ces expériences pourrait bien avoir un impact considérable sur la manière dont nous comprenons la santé mentale et la spiritualité.