En Papouasie-Nouvelle-Guinée, les os humains étaient utilisés pour fabriquer des dagues

Crédits : Bruno Zanzottera

En Nouvelle-Guinée, les hommes fabriquaient avec le plus grand soin des armes à partir des fémurs de leurs pères ou « d’un autre membre de la communauté très respecté », selon une étude publiée mercredi dans Royal Society Open Science.

Jusqu’au 20e siècle, l’utilisation de dagues taillées à partir d’os était courante chez les habitants de l’île Pacifique de Papouasie-Nouvelle-Guinée. Beaucoup de ces poignards ont été forgés à partir des fémurs de grands volatiles comme les casoars, ces oiseaux agressifs incapables de voler, mais certains ont été fabriqués à partir d’os humains. Ils sont souvent sculptés avec des motifs décoratifs et se présentent comme de véritables symboles de statut social, forgés à partir des fémurs d’hommes respectés, en particulier ceux provenant de guerriers. À l’occasion, un fils héritait alors du fémur de son père, seulement une fois son corps décomposé.

Ces poignards étaient donc des objets d’expression artistique et des indicateurs de statut social, mais ils étaient aussi de véritables armes de combat rapproché. Les guerriers visaient alors généralement le cou – juste au-dessus de l’extrémité du sternum et de la clavicule – pour achever leurs victimes blessées au préalable par des flèches ou des lances.

Le casse-tête pour les anthropologues était de comprendre pourquoi certaines dagues étaient fabriquées à partir d’os du tibia du casoar tandis que d’autres étaient fabriquées à partir d’os de cuisse humaine. Avant cette nouvelle étude, on ignorait également si les dagues fabriquées à partir d’os humains étaient plus fortes ou plus faibles que celles fabriquées à partir d’os d’oiseaux, mais vu le double objectif des poignards, il était également possible que le prestige social de l’os humain l’emporte sur sa valeur fonctionnelle.

Ces dagues fabriquées à partir d’os humains permettaient notamment d’affirmer un statut social.
Crédits : Hood Museum of Art/ Dartmouth College

Pour le comprendre, une équipe dirigée par Nathaniel Dominy, du Dartmouth College (États-Unis), a effectué des tests de stress physique sur un poignard en os de casoar, et des tests de stress virtuels sur 11 dagues simulées au Hood Museum of Art de Dartmouth. « Nous avons plié lentement le poignard d’os de casoar jusqu’à ce qu’il se brise et mesuré comment l’os résistait à la rupture », expliquent les chercheurs, qui ont ensuite estimé comment chaque dague simulée au Hood Museum répondait à différents types de stress. « Nous avons découvert que les poignards en os humains sont mécaniquement supérieurs aux dagues en os de casoar », peut-on lire en conclusion de cette expérience.

Plus précisément, les modèles ont montré que les os des humains et des oiseaux partageaient des propriétés physiques similaires, mais que les premiers présentaient une plus grande résistance à la flexion. Ils ont également conservé une plus grande courbe, suggérant une caractéristique de conception délibérée pour produire un poignard plus fort. Une analyse plus poussée a aussi révélé une plus grande résistance aux grandes charges et moins de défaillances structurelles.

L’étude suggère ici que les hommes fabriquaient avec un plus grand soin des armes à partir des fémurs de leur père ou de membres respectés de leur communauté. L’idée n’était alors pas que ces dagues puissent tuer plus facilement, mais que ces objets puissent durer dans le temps. Si les os de casoars offraient la même robustesse que les os humains, ils n’avaient toutefois pas la même dimension symbolique.

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