Ukraine message planète Gliese
Crédits : Pitris/istock

En 2008, l’Ukraine a envoyé un message déroutant vers la planète Gliese 581c… Et il arrive bientôt !

En 2008, l’humanité a tenté quelque chose de fou : envoyer un message à une exoplanète située à 21 années-lumière, dans l’espoir, aussi mince soit-il, qu’une forme de vie intelligente le capte, le comprenne et… réponde.

La planète en question s’appelle Gliese 581c. Elle gravite autour d’une étoile naine rouge nommée Gliese 581, située dans la constellation de la Balance. Découverte un an plus tôt, en 2007, cette planète avait brièvement attiré l’attention de la communauté scientifique en raison de sa proximité avec ce qu’on appelle la « zone habitable » : une région autour d’une étoile où l’eau liquide – et donc potentiellement la vie – pourrait exister.

Une super-Terre qui fait rêver

Gliese 581c appartient à la catégorie des « super-Terres ». Elle est environ 5,5 fois plus massive que la Terre, et bien qu’elle soit aujourd’hui considérée comme étant probablement trop chaude pour abriter de l’eau liquide, son potentiel théorique d’habitabilité n’a pas été complètement écarté.

En réalité, les premières modélisations de l’époque plaçaient Gliese 581c juste à l’intérieur ou tout juste à l’extérieur de la limite interne de la zone habitable, selon les hypothèses retenues (type d’atmosphère, couverture nuageuse, effets de serre, etc.). En résumé, il est hautement improbable que la planète abrite de la vie telle que nous la connaissons, mais pas strictement impossible.

Un message venu de Bebo

Cela n’a pas empêché un projet audacieux – et un peu farfelu – de voir le jour. En octobre 2008, dans le cadre du projet « Message from Earth », un signal radio a été envoyé depuis l’Ukraine à destination de Gliese 581c.

Contrairement aux messages formels des sondes Voyager, soigneusement élaborés sous la supervision de scientifiques comme Carl Sagan, le contenu de ce message interstellaire a été largement façonné par les utilisateurs du réseau social Bebo, aujourd’hui disparu. Plus de 500 messages, images et textes ont été sélectionnés par les internautes, avec des contributions allant du profond au franchement saugrenu.

Parmi les éléments envoyés : des photos de Hillary Clinton, de présentateurs TV britanniques, un montage de Barack Obama et George W. Bush (symbolisant le bien et le mal, selon Gillian Anderson, actrice de X-Files), une image de Cheryl Cole désignée comme représentant le « corps parfait », ainsi que des messages sur la paix ou le sens de la vie.

Ukraine message planète Gliese
Gliese 581 photographié par le Sloan Digital Sky Survey. Crédit image : Sloan Digital Sky Survey via ESO

Un aller-retour de 42 ans

Le signal mettra 21 ans à atteindre sa cible. Il arrivera donc à destination en 2029. Dans l’hypothèse hautement spéculative où une civilisation extraterrestre existerait sur cette planète, qu’elle dispose de technologies radio, qu’elle capte le message, le comprenne et y réponde immédiatement, la réponse n’arriverait sur Terre qu’en 2050.

Ce scénario est, bien sûr, extrêmement improbable. La planète n’a encore révélé aucun signe d’habitabilité confirmée, et la probabilité que des êtres intelligents s’y trouvent, prêts à interagir, reste infime. Et pourtant, ce projet soulève une question vertigineuse : que choisirions-nous d’envoyer dans l’espace si nous avions l’occasion de représenter l’humanité à des êtres inconnus ?

Une blague cosmique ?

Il est fascinant – et peut-être un peu embarrassant – de penser que notre carte de visite interstellaire pourrait inclure des célébrités, des mèmes culturels éphémères et des choix de beauté subjectifs, plutôt que des messages scientifiques, humanistes ou philosophiques soigneusement élaborés.

Mais ce projet révèle aussi quelque chose de profondément humain : notre besoin de raconter, de tendre la main, de chercher un écho dans l’univers, même quand les chances sont proches de zéro. L’idée de ne pas être seuls alimente notre imagination depuis des siècles. Envoyer un message à une exoplanète, c’est peut-être moins un acte scientifique qu’un geste symbolique, poétique, un miroir de notre époque et de ses obsessions.

Un espoir tenace

Depuis 2008, des études ont affiné notre compréhension du système Gliese 581. Certaines d’entre elles réévaluent prudemment l’habitabilité de certaines planètes du système, y compris Gliese 581c. Des scénarios impliquant des formes de vie extrêmophiles – capables de survivre dans des conditions extrêmes – ont également été proposés.

Cela reste néanmoins de la pure spéculation. Mais en science, les spéculations sont parfois le point de départ d’avancées inattendues. Et même si Gliese 581c s’avère stérile, le simple fait que l’humanité se soit tournée vers elle en dit long sur notre curiosité sans frontières – et notre capacité à rêver très, très loin.

Brice Louvet

Rédigé par Brice Louvet

Brice est un journaliste passionné de sciences. Ses domaines favoris : l'espace et la paléontologie. Il collabore avec Sciencepost depuis près d'une décennie, partageant avec vous les nouvelles découvertes et les dossiers les plus intéressants.