Dévier la lumière du soleil pour refroidir la planète ? Mauvaise idée

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Certains scientifiques réfléchissent à la géo-ingénierie solaire : la « solution volcanique » au réchauffement climatique qui viserait à réfléchir la lumière du Soleil dans le but de refroidir la planète. Une mesure ultime et désespérée.

En 1991, le mont Pinatubo entra en éruption de manière spectaculaire. La chute de cendres eut raison de centaines de personnes dans la région centrale de Luzon, aux Philippines. Des cendres et des gaz chauds fondus ont également été projetés dans la haute atmosphère, puis répartis dans le monde entier, reflétant ainsi la lumière du soleil et refroidissant naturellement la planète pendant plus d’un an. La nature nous aurait-elle alors montré, au prix de nombreuses vies, le moyen de limiter le réchauffement climatique ? Nous ne pouvons commander les éruptions volcaniques, mais pourrions-nous en imiter les effets ?

L’idée s’appuie sur l’utilisation d’aérosols pour réfléchir la lumière du soleil dans l’espace, et ainsi « refroidir » le climat de manière artificielle. Pour certains, la technique pourrait profiter à l’agriculture en prévenant le stress thermique sur les cultures vivrières. Mais un article publié mercredi dans la revue Nature présente une conclusion différente. En utilisant des données historiques de deux éruptions volcaniques, les chercheurs concluent que le fait de falsifier l’atmosphère n’aura aucun effet net sur les rendements des cultures.

Les cultures vivrières ne subiraient pas autant de stress thermique, certes, mais elles ne recevraient pas autant de lumière solaire nécessaire pour la photosynthèse. Les avantages seraient ainsi compensés par les inconvénients. « Si nous considérons la géo-ingénierie comme une chirurgie expérimentale, nos résultats suggèrent que les effets secondaires du traitement sont aussi graves que la maladie d’origine« , explique Jonathan Proctor, économiste agricole à l’Université de Californie à Berkeley et auteur principal du document.

Il existe, par ailleurs, une différence entre la géo-ingénierie solaire et les éruptions volcaniques. La géo-ingénierie solaire n’impliquerait pas une impulsion ponctuelle de matériaux en un seul endroit, mais plutôt une opération continue en de nombreux points. Les scientifiques et dirigeants politiques n’en savent pas assez sur les conséquences, bonnes ou mauvaises, intentionnelles et involontaires d’un tel effort. La technologie n’existe même pas encore. Il y a aussi la question non triviale de savoir qui, exactement, aurait l’autorité et la responsabilité de « changer le ciel » partout sur Terre.

Enfin, et quand bien même tout le monde s’accorderait, il ne s’agirait pas d’un coup unique. Si des aérosols sont pompés dans l’atmosphère, par un volcan ou une technologie, ils ne restent pas là pour toujours. Une grande partie de cette matière migre vers les latitudes polaires et se fond progressivement dans de plus grosses gouttelettes avant de tomber sur la Terre. Pour reconstituer l’approvisionnement en aérosols bloquant la lumière du soleil, les générations futures devront s’engager pleinement dans le projet sans interruption. Sinon, la température de la planète augmenterait pratiquement du jour au lendemain.

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