Des voiles solaires en graphène pourraient-elles nous propulser dans l’espace ?

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Illustration artistique d'une voile solaire / Credit: breakthroughinitiatives.org

Des voiles solaires composées de graphène – le matériau le plus fin du monde – pourraient un jour propulser de petites sondes vers d’autres systèmes stellaires. Telle est la promesse d’un récent test mené par l’ESA.

Le graphène est une matière qui se compose d’un unique feuillet en deux dimensions composé d’atomes de carbone arrangés selon un motif hexagonal. Ultra-résistante et ultra-conductrice, cette matière promet de révolutionner de nombreuses applications. Elle présage, entre autres, de fournir une énergie propre et illimitée ou encore de permettre un Internet surpuissant. Une étude nous a également révélé que deux simples couches de graphène pourraient même nous protéger des balles.

Mais le graphène possède une autre corde à son arc : il est ultra-léger. Ce qui, là encore, pourrait permettre d’autres applications. Comme le voyage interstellaire ? C’est encore trop tôt pour le dire, mais l’ESA y pense.

Voyager différemment dans l’espace

Pour voyager dans l’espace, les vaisseaux traditionnels s’appuient sur du carburant et manoeuvrent autour d’autres mondes pour gagner en vitesse. Ces techniques ont permis d’analyser de près la grande majorité des planètes de notre système.

Mais les méthodes de propulsion actuelles sont limitées. En effet, le carburant pèse lourd, et les manoeuvres de fronde gravitationnelle font perdre un temps précieux. C’est pourquoi, depuis quelques années, l’attention se porte vers les voiles solaires.

Le principe : utiliser les rayons du Soleil (photons) frappant une gigantesque voile (au moins un kilomètre de diamètre) pour assurer la propulsion d’une sonde, comme pourrait le faire un voilier s’appuyant sur la force du vent. À terme, ce nouveau moyen de propulsion pourrait nous permettre de parcourir de plus longues distances dans l’espace, tout en économisant un maximum d’énergie.

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Vue d’artiste de la voile solaire LightSail 2. Crédits : Josh Spradling

Des voiles en graphène

L’idée ne date pas d’hier. Dès 1975 la NASA avait imaginé une première voile solaire dans le but de visiter la comète de Halley. Mais le projet fut rapidement abandonné. En 1999, The Planetary Society avait également travaillé sur un projet baptisé Cosmos-1, dont le lancement s’est malheureusement soldé par un échec.

Les choses ont ensuite évolué en 2010 avec l’Agence spatiale japonaise qui parvient à lancer sa propre sonde à voile solaire, baptisée Ikaros. Puis en 2015 avec The Planetary Society qui réussit de son côté à déplier une première voile solaire, baptisée LightSail-1. L’entreprise s’est une nouvelle fois illustrée en septembre dernier avec le déploiement réussi de sa voile solaire LightSail-2.

Ces projets ont permis de tester avec succès la technologie, mais pourrait-on encore l’améliorer ? Au cours de ces missions, les ingénieurs ont utilisé des voiles en polyimides et en mylar, un film de polyester connu pour sa haute résistance à la traction. Mais si ces polymères peuvent effectivement être coupés en feuilles extrêmement minces, ils n’ont rien de comparable au graphène, beaucoup plus fin et léger.

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Une (petite) voile solaire en graphène. Crédits : ESA

Un test prometteur

Pour savoir si cette matière pouvait être utilisée comme voile solaire, des ingénieurs de l’ESA, en collaboration avec l’entreprise SCALE Nanotech, ont utilisé un feuillet de seulement 3 millimètres de diamètre. Ils l’ont fait tomber d’une tour de 100 mètres de haut à Brême, en Allemagne, pour tester son efficacité en milieu de microgravité. Une fois la voile en chute libre, les chercheurs ont braqué une série de lasers dessus, et observé sa réponse.

« Faire briller un laser de 1 watt a fait accélérer la voile jusqu’à 1 m / s 2, similaire à l’accélération d’un ascenseur de bureau », explique l’ESA dans un communiqué. Or, comme le soulignent les chercheurs, une telle accélération en continu, permise grâce à la lumière solaire, permettrait de propulser de petits vaisseaux à des vitesses de plus en plus élevées.

Ce n’est bien sûr qu’un premier test, mais un test positif. D’autant que la fabrication de graphène est relativement simple et pourrait facilement être étendue à des voiles d’un kilomètre de large. Même si les chercheurs en conviennent, le déploiement d’une voile aussi grande sera, en soi, un défi de taille.

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