Des réseaux de neurones artificiels pourraient conduire à une meilleure prise en compte des nuages dans les modèles de climat !

nuage ciel
Crédits : Pixabay

La représentation des nuages et des processus fondamentaux qui leur sont associés dans les modèles de climat est un problème de longue date, qui n’a connu que des améliorations relativement lentes au cours des dernières décennies. Une étude publiée ce 9 septembre a évalué l’efficacité de l’approche par machine-learning ou apprentissage automatique. Les résultats obtenus sont plutôt encourageants.

Si les nuages peuvent stimuler l’imagination des observateurs du ciel, les faire voyager et même inspirer certains artistes, ils sont en revanche la bête noire des modélisateurs du climat. En effet, derrière leurs airs légers, ils posent un vrai défi quant à leur représentation dans les outils numériques servant aux projections climatiques – mais également dans ceux utilisés pour les prévisions météorologiques, même si les implications sont relativement moindres.

Les nuages évoluent très rapidement, présentent des structures généralement très hétérogènes et dépassent parfois à peine la centaine de mètres de largeur. Les cumulus des zones d’alizés par exemple – qui couvrent une fraction substantielle de la planète – ne font pas plus de quelques centaines à 1 kilomètre de haut et de large. Un cumulonimbus pris isolément s’étend sur une dizaine de kilomètres de largeur à peine. Or, la résolution horizontale des modèles de climat se situe actuellement entre 50 et 100 kilomètres. Tous les processus nuageux qui participent activement à l’équilibre climatique de notre planète ne peuvent donc pas être simulés explicitement – on parle de phénomènes sous-maille – et les scientifiques en tiennent compte via ce que l’on appelle des paramétrisations.

Ces paramétrisations sont des sortes de descriptions approximatives des processus, basées sur des observations ainsi que sur notre compréhension physique. Elles sont censées tenir compte de l’effet moyen de ces phénomènes sur la plus grande échelle. On intègre donc une sorte d’artifice au modèle afin de prendre en considération ce qu’il ne peut pas simuler explicitement. Dans la pratique, chaque modèle intègre des dizaines de paramétrisations – pour les nuages, la végétation, la turbulence, les transferts radiatifs, etc. Toutefois, certaines paramétrisations présentent des imperfections de taille, qui peuvent biaiser sensiblement la simulation.

nuages espace
La richesse des nuages vue depuis l’espace. Crédits : NASA.

Par exemple, si une paramétrisation ne permet pas au modèle de produire un brassage suffisant entre l’air nuageux et l’air sous-saturé de l’environnement, celui-ci pourrait simuler une couverture nuageuse trop importante et donc un albédo du système Terre trop élevé – toutes choses égales par ailleurs. En conséquence, la température moyenne à la surface du globe serait trop basse. La communauté des modélisateurs est donc constamment à la recherche de moyens pour améliorer la prise en compte des processus sous-maille, et notamment celle des nuages. Cette nécessité est d’autant plus urgente que ce sont eux qui sont actuellement la source principale d’incertitude sur l’ampleur du changement climatique modélisé d’ici la fin du siècle, pour un scénario socio-économique donné.

Dans ce contexte, une étude publiée le 6 septembre dernier dans la revue scientifique PNAS a exploré une technique alternative pouvant potentiellement améliorer la représentation des nuages dans les modèles de climat et de météo. Elle se base sur le machine-learning ou apprentissage automatique, qui consiste à « mimer » les capacités d’apprentissage de l’être humain. À cet effet, les chercheurs ont mis en place un réseau de neurones artificiels de type apprentissage profond, et l’ont entraîné pendant 3 mois sur la base d’un modèle à très haute résolution simulant explicitement les nuages*. « Le réseau de neurones a appris à représenter de façon approximative les contraintes physiques fondamentales sur la façon dont les nuages ​​déplacent la chaleur et la vapeur d’eau sans que cela soit explicitement demandé », a déclaré l’auteur principal de l’étude Stephan Rasp. L’utilisation du réseau neuronal permet de tirer parti des avantages des simulations à très haute résolution sur lesquelles il a appris, sans nécessiter les lourdes ressources informatiques associées.

L’étude montre des résultats assez encourageants qui pourraient conduire à terme au remplacement des paramétrisations « manuelles » par des réseaux de neurones artificiels. Cette méthode pourrait également s’appliquer pour d’autres processus du système climatique. « Des défis doivent encore être surmontés, mais les progrès de l’informatique et de l’apprentissage automatique au cours des dernières années présentent de nouvelles opportunités qui commencent à peine à être étudiées. Nous pensons que les approches d’apprentissage automatique offrent un grand potentiel qui devrait être exploré de concert avec le développement traditionnel de modèles », conclut l’étude.

* Ces modèles ne peuvent pas être utilisés directement pour les simulations climatiques car ils nécessitent de trop grandes ressources informatiques. Actuellement, ils produisent au mieux des simulations d’une durée de quelques mois à quelques années seulement.

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