Les patients qui font de la chimiothérapie ou suivent d’autres thérapies anticancéreuses se retrouvent souvent confrontés à bon nombre d’effets secondaires. En effet, ces traitements peuvent principalement bouleverser leurs papilles gustatives ainsi que leurs sens olfactifs, en les privant des pleines capacités de leur odorat et du goût. Ces dysfonctionnements, avec le temps, peuvent entraîner des pertes d’appétit, des dépressions et des comportements anorexiques qui influent sur la capacité du patient à bien se rétablir. Les résultats d’une recherche sur le sujet sont publiés dans la revue Food & Function, ce mois de septembre 2018, et relayés par Virginia Tech.
Comment s’est déroulée l’étude ?
De base, les chercheurs avaient bien conscience que les troubles du goût et de l’odorat sont un véritable calvaire pour les patients cancéreux. En effet, Susan Duncan, directrice associée de la Virginia Agricultural Experiment Station et professeure au Département des sciences et technologies alimentaires, précise que « le symptôme dominant décrit par les patients subissant une chimiothérapie est une saveur ou un arrière-goût métallique persistant, avec ou sans apport alimentaire. Cela peut durer des heures, des semaines, voire des mois après la fin des traitements ».
De plus, avant cette étude, on ne connaissait ni les mécanismes moléculaires qui provoquaient cet effet secondaire, ni les traitements efficaces. Les chercheurs ont eu l’idée d’utiliser la lactoferrine (LF), qui est une protéine du lait ayant la particularité de se lier au fer. Ils ont supposé que celle-ci pourrait amoindrir les effets secondaires de la chimiothérapie, et en ont profité pour étudier son impact en analysant les protéines salivaires. Bien souvent, le trouble de l’odorat est lié à un trouble du goût – et inversement – car ces deux sens sont essentiels pour reconnaître un aliment.
L’expérience se déroulait sur 19 patients atteints d’un cancer, et qui après une chimiothérapie avaient eu des troubles du goût et de l’odorat. De plus, il y avait aussi 12 autres personnes en bonne santé. Pendant 30 jours, chaque sujet de l’expérience prenait 3 comprimés par jour qui contenait 250 mg de LF. Ensuite, les chercheurs ont prélevé la salive à trois moments : au début de l’étude, à la fin des 30 jours de la prise de comprimés, et enfin, 30 jours après la dernière prise de LF.
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Crédits : Lijealso / Wikimedia
Ce qu’ont montré les analyses salivaires
Ainsi, ils ont pu voir qu’un trouble du goût et de l’odorat élevé s’accompagnait d’une forte concentration de fer salivaire et d’une diminution de protéines salivaires immunitaires.
Lors de la prise de LF, la concentration en fer a nettement diminué, et les quantités d’alpha-amylase et de Zinc-alpha-2-GP ont augmenté (protéines qui ont un rôle dans la dégradation de nutriments et molécules). De plus, cela a aussi entraîné une hausse de protéines immunitaires.
Le relevé salivaire de 30 jours après la dernière prise de comprimé a montré que l’abondance des protéines de dégradation des aliments et nutriments avait encore augmenté. De plus, presque tous les patients ne sentaient plus de troubles.
« Nos recherches montrent que la prise quotidienne de suppléments de lactoferrine entraîne des changements dans les profils protéiques salivaires chez les patients atteints de cancer – des changements qui peuvent contribuer à protéger les papilles gustatives et la perception des odeurs », indique Duncan.
De plus, elle ajoute ceci : « En suggérant la lactoferrine comme complément alimentaire, nous pouvons réduire le trouble du goût et de l’odorat chez de nombreux patients, en rétablissant leur capacité à apprécier les aliments pendant une période où la nutrition peut jouer un rôle clé dans leur rétablissement. Cette recherche pourrait nous aider à mettre au point des biomarqueurs destinés à ces troubles et des stratégies pour améliorer la qualité de vie pendant la chimiothérapie. Les patients atteints de cancer et les membres de leur famille et amis qui les soutiennent peuvent de nouveau trouver du réconfort en savourant un repas ensemble. »
L’impact de cette étude pour l’avenir
Ainsi, cette étude va permettre à l’avenir d’aider les patients souffrant des effets secondaires de la chimiothérapie. En effet, grâce à la LF qui rétablit le goût et l’odorat, la vie des patients pourra être améliorée durant les moments où la forme psychologique peut jouer sur la phase de guérison. L’appétit, la bonne sensation de goût et d’odorat peut aussi permettre à ces patients de vivre dans les meilleures conditions possible cette étape de leur vie.
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