Des mini cerveaux de NĂ©andertal poussent en laboratoire

Neandertal
Crédits : Allan Henderson / Flickr

Les Néandertaliens se sont éteints il y a environ 40 000 ans. Pourquoi ? On ne le sait pas encore. Mais des mini cerveaux cultivés dans un laboratoire américain en Californie pourraient bientôt nous donner la réponse.

Pourquoi les Néandertaliens se sont-ils éteints alors qu’Homo sapiens a prospéré pour finalement conquérir une grande partie de la planète ? C’est la grande question. Nous avons en effet cohabité, nous sous sommes accouplés, mais sur les deux espèces, il n’en reste aujourd’hui plus qu’une. Des différences génétiques entre le cerveau néandertalien et le cerveau humain pourraient-elles expliquer leur disparition et notre « succès » ?

Pour le savoir, des chercheurs ont comparĂ© le gĂ©nome de NĂ©andertaliens (prĂ©cĂ©demment extrait d’os fossiles et sĂ©quencĂ© par d’autres chercheurs) avec celui des humains modernes. Sur 200 gènes candidats qui ont montrĂ© des diffĂ©rences significatives entre les deux espèces, les chercheurs ont dĂ©cidĂ© de se concentrer sur un seul : un rĂ©gulateur d’expression de gène connu sous le nom NOVA1. Pour ce faire, ils ont cultivĂ© des mini cerveaux nĂ©andertaliens (nĂ©androĂ¯des). GrĂ¢ce Ă  l’outil d’édition de gènes CRISPR, les chercheurs ont ainsi pu « nĂ©andertaliser » des cellules souches pluripotentes humaines (des cellules qui peuvent se dĂ©velopper dans n’importe quelle cellule du corps).

Ce processus de transformation aura pris entre six et huit mois. Maintenant complètement dĂ©veloppĂ©s, les nĂ©androĂ¯des mesurent environ 0,5 centimètre. « Ainsi, vous pouvez rĂ©ellement les voir Ă  l’œil nu une fois qu’ils sont mĂ»rs », explique Alysson Muotri, directrice du programme de cellules souches de l’UniversitĂ© de Californie Ă  San Diego. Ces mini cerveaux ne peuvent pas grossir, car ils ne sont pas vascularisĂ©s – ce qui signifie qu’ils ne sont pas alimentĂ©s avec du sang. Les mini cellules cĂ©rĂ©brales (il y en a jusqu’à 400 000 par cerveau) reçoivent des nutriments par diffusion.

Qu’est-ce qu’il en ressort, alors ? Les cerveaux humains cultivĂ©s en laboratoire sont gĂ©nĂ©ralement ronds, mais les nĂ©androĂ¯des ne l’étaient pas. Ceux-ci se dĂ©veloppaient en des structures tubulaires allongĂ©es, « en forme de pop-corn », explique la chercheuse. Par ailleurs, les cerveaux des NĂ©andertaliens n’avaient pas autant de connexions synaptiques, ou de liens entre les neurones, et avaient des rĂ©seaux neuronaux altĂ©rĂ©s.

« Ces caractéristiques ressemblent aux mini-cerveaux humains issus de personnes atteintes d’autisme », explique-t-elle. Cependant, « une corrélation ne signifie pas qu’ils sont similaires, nous ne pouvons que spéculer à ce sujet à ce stade. Je ne veux pas que les familles concluent que je compare les enfants autistes aux Néandertaliens, mais c’est une observation importante. Chez les humains modernes, poursuit-elle, ces types de changements sont liés à des défauts de développement du cerveau qui sont nécessaires pour la socialisation. Si nous pensons que c’est l’un de nos avantages par rapport aux hommes de Néandertal, c’est pertinent ».

La recherche n’en est encore qu’à ses dĂ©buts, et elle prĂ©sente certaines limites (les organoĂ¯des reprĂ©sentent seulement le stade prĂ©coce du dĂ©veloppement cĂ©rĂ©bral). Mais Ă  terme, les chercheurs espèrent pouvoir dĂ©celer des variantes gĂ©nĂ©tiques essentielles au succès de l’homme. « Nous pourrions voir quelles sont les altĂ©rations gĂ©nĂ©tiques qui nous ont rendus uniquement humains et pourquoi ils ont Ă©tĂ© positivement sĂ©lectionnĂ©s », conclut la chercheuse.

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