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Colonie de champignons Aspergillus. Crédits : Artur Plawgo/istock

Des champignons toxiques pourraient menacer des millions de vies en Europe : une étude tire la sonnette d’alarme !

Quand on évoque les catastrophes climatiques à venir, on pense souvent à la montée des eaux, aux incendies de forêt ou à l’effondrement de la biodiversité. Mais il existe un danger plus discret, plus insidieux — et peut-être bien plus proche de nous que nous ne l’imaginons : les champignons pathogènes. Une nouvelle étude alerte sur la menace que ces micro-organismes, souvent négligés, pourraient représenter dans un monde de plus en plus chaud et humide.

Un monde fongique sous-estimé

On estime aujourd’hui qu’il existe plusieurs millions d’espèces de champignons sur Terre, dont à peine 10 % ont été identifiées. Parmi elles, certaines sont comestibles, d’autres essentielles à la décomposition des matières organiques… et une fraction plus sombre : les espèces pathogènes. Ces dernières sont capables de provoquer des infections graves chez l’humain et de détruire des cultures entières. Pourtant, elles demeurent largement ignorées dans les débats sur les effets du réchauffement climatique.

C’est ce que tente de corriger une équipe de chercheurs de l’université de Manchester, qui a publié une étude prospective sur la plateforme ResearchSquare. Leur constat : le réchauffement global pourrait favoriser l’essor de champignons toxiques dans des proportions inquiétantes.

Des champignons qui adorent la chaleur

Le mécanisme est simple : à mesure que les températures augmentent, certains champignons deviennent plus compétitifs, car ils tolèrent mieux la chaleur. C’est le cas d’Aspergillus flavus, connu pour produire des mycotoxines dangereuses pour les humains et les animaux, mais aussi pour causer la pourriture de nombreuses denrées agricoles.

Selon l’étude, si notre dépendance aux énergies fossiles continue sans transition vers des sources renouvelables, la prolifération d’A. flavus pourrait augmenter de 16 % en Europe d’ici 15 ans, exposant potentiellement un million de personnes supplémentaires à un risque sanitaire.

Mais le pire reste à venir avec Aspergillus fumigatus. Souvent classé comme « faiblement pathogène », ce champignon pourrait voir sa présence exploser de 77,5 %, mettant en danger neuf millions de personnes en Europe, notamment les plus vulnérables — immunodéprimés, patients hospitalisés ou personnes âgées.

Une menace difficile à contrôler

Ce qui rend ces champignons particulièrement dangereux, c’est leur mode de transmission : l’air que nous respirons. Invisibles, omniprésents, leurs spores peuvent flotter librement et être inhalées sans que nous nous en rendions compte. Dans les climats chauds et humides, leur prolifération devient plus difficile à contenir. Et contrairement aux bactéries, les infections fongiques sont souvent plus difficiles à traiter, en raison d’un arsenal antifongique limité et de résistances croissantes.

Pour Norman van Rhijn, auteur principal de l’étude, le problème est clair : « Les champignons pathogènes sont encore trop peu étudiés par rapport aux virus ou aux bactéries. Pourtant, leur impact pourrait être massif à mesure que le climat évolue. »

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Colonie de champignons Aspergillus. Crédits : Artur Plawgo/istock

La double peine écologique

Le problème ne s’arrête pas aux champignons pathogènes. Certains champignons bénéfiques, qui assurent des fonctions écologiques clés comme la décomposition des matières organiques ou la symbiose avec les plantes, risquent de disparaître des zones les plus chaudes du globe. L’Afrique, par exemple, pourrait perdre des espèces cruciales pour le bon fonctionnement de ses écosystèmes.

On se retrouve donc face à une double menace : d’un côté, des champignons dangereux qui prolifèrent. De l’autre, des champignons indispensables qui déclinent. Ce déséquilibre fongique pourrait avoir des effets en cascade sur l’agriculture, la biodiversité… et la santé humaine.

Une course contre la montre

L’étude ne se veut pas alarmiste, mais préventive. Elle appelle à une prise de conscience plus large autour du rôle des champignons dans les écosystèmes et la santé publique. Elle souligne aussi l’urgence de réduire nos émissions de gaz à effet de serre pour limiter la propagation de ces pathogènes invisibles.

Car si ces projections se confirment, les prochaines décennies pourraient bien voir l’essor de maladies fongiques inédites, émergentes, difficiles à diagnostiquer et encore plus dures à traiter.

Brice Louvet

Rédigé par Brice Louvet

Brice est un journaliste passionné de sciences. Ses domaines favoris : l'espace et la paléontologie. Il collabore avec Sciencepost depuis près d'une décennie, partageant avec vous les nouvelles découvertes et les dossiers les plus intéressants.