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Crédits : gorodenkoff/istock

Découverte surprenante : les Néandertaliens possédaient leurs propres « recettes de famille » !

Imaginez deux familles voisines préparant le même gigot d’agneau de manière complètement différente. L’une le découpe en fines lamelles avec précision, l’autre le hache menu dans tous les sens. Cette scène pourrait sembler banale aujourd’hui, mais elle révèle en réalité l’une des découvertes les plus surprenantes sur nos cousins disparus : les Néandertaliens possédaient déjà leurs propres traditions culinaires familiales il y a 60 000 ans.

Quand l’archéologie révèle les secrets de la cuisine préhistorique

Une équipe de recherche dirigée par Anaëlle Jallon vient de bouleverser notre compréhension des Néandertaliens grâce à une approche scientifique inédite. Plutôt que de s’intéresser aux outils ou aux peintures rupestres, les chercheurs ont scruté à la loupe les traces laissées par les couteaux préhistoriques sur les ossements d’animaux.

Leur terrain d’investigation ? Deux grottes israéliennes, Amud et Kebara, séparées par seulement 70 kilomètres. Ces sites ont abrité des communautés néandertaliennes contemporaines pendant plusieurs millénaires, entre 50 000 et 60 000 ans avant notre époque. Un laboratoire naturel parfait pour comprendre comment vivaient nos lointains cousins.

L’analyse minutieuse de 344 ossements d’animaux a révélé une différence frappante dans les habitudes de boucherie. Les habitants de Kebara découpaient leurs proies en produisant de grands fragments d’os, marqués par quelques traces de coupe nettes et espacées. À Amud, en revanche, les ossements retrouvés sont de petite taille et littéralement criblés de marques de découpe entrecroisées.

Au-delà de la simple survie : l’émergence d’une culture culinaire

Cette découverte remet fondamentalement en question l’image traditionnelle des Néandertaliens. Pendant des décennies, les scientifiques les ont dépeints comme des êtres uniquement préoccupés par leur survie immédiate, dépourvus de sophistication culturelle. Si cette vision était exacte, toutes les communautés auraient logiquement adopté la méthode la plus efficace pour dépecer un animal donné.

Or, les preuves archéologiques démontrent exactement l’inverse. Les deux communautés chassaient les mêmes animaux, utilisaient des outils similaires et vivaient dans des environnements comparables. Pourtant, leurs techniques de découpe différaient radicalement. Cette diversité ne peut s’expliquer que par l’existence de préférences culturelles distinctes.

Les chercheurs proposent plusieurs hypothèses pour expliquer ces différences. À Amud, peut-être que chaque membre du groupe découpait sa propre portion de viande, créant ainsi une multitude de marques anarchiques. À Kebara, une seule personne spécialisée pourrait avoir été responsable de la découpe pour tout le groupe. Alternativement, les deux communautés pratiquaient peut-être des méthodes de conservation différentes – séchage, fermentation – nécessitant des techniques de préparation spécifiques.

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Un os découpé par un Néandertalien dans la grotte d’Amud. Crédits : Anaëlle Jallon

Des traditions transmises à travers les générations

L’aspect le plus remarquable de cette étude réside dans la constance de ces pratiques. Les analyses révèlent que ces différences de découpe se sont maintenues pendant des millénaires, à travers de nombreuses générations d’occupants. Cette permanence suggère l’existence d’un véritable processus de transmission culturelle au sein des communautés néandertaliennes.

Cette découverte s’inscrit dans une révision plus large de notre compréhension des Néandertaliens. Des recherches récentes ont déjà démontré que ces hominidés maîtrisaient des techniques de fabrication d’outils sophistiquées, variant selon les régions. Ils créaient des parures, pratiquaient peut-être l’art rupestre et enterraient leurs morts selon des rituels complexes.

Une fenêtre sur la complexité néandertalienne

L’étude, publiée dans Frontiers in Environmental Archaeology, ouvre une nouvelle fenêtre sur la richesse comportementale de nos cousins disparus. Elle révèle que même dans des aspects aussi fondamentaux que l’alimentation, les Néandertaliens développaient des traditions locales sophistiquées.

Ces découvertes nous rappellent que l’humanité n’a pas le monopole de la diversité culturelle. Il y a 60 000 ans, alors que notre espèce colonisait à peine certaines régions du globe, les Néandertaliens avaient déjà développé leurs propres « recettes de famille », transmises religieusement de génération en génération.

Cette recherche illustre également la richesse des informations que peuvent révéler les vestiges archéologiques les plus modestes. Derrière chaque os marqué par un silex se cache une histoire humaine, témoin d’une culture disparue mais désormais un peu moins mystérieuse.

Brice Louvet

Rédigé par Brice Louvet

Brice est un journaliste passionné de sciences. Ses domaines favoris : l'espace et la paléontologie. Il collabore avec Sciencepost depuis près d'une décennie, partageant avec vous les nouvelles découvertes et les dossiers les plus intéressants.