Découverte de la première famille connue de Néandertaliens

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Crédits : Tom Bjorklund

En analysant des fossiles d’une grotte en Sibérie, des chercheurs ont identifié la première famille de Néandertaliens connue. Elle comprenait un père, sa fille adolescente et probablement des cousins ​​proches. Il y a plus de 50 000 ans, les membres de cette famille sont morts alors qu’ils s’abritaient dans leur camp de chasse. Les détails de l’étude sont publiés dans la revue Nature.

À une centaine de kilomètres à l’ouest de la grotte Denisova, où ont été trouvés les premiers restes de Dénisoviens il y a un peu plus de dix ans, se trouve la grotte Chagyrskaya. Il y a trois ans, des excavateurs y ont trouvé plusieurs dizaines de milliers d’artefacts, ainsi que des restes d’animaux et de plantes. Plus intéressant encore, les chercheurs ont également identifié 74 fossiles de Neandertal. Les restes organiques de cette grotte (sorte de camp de chasse au bison) ont été datés au radiocarbone à entre 51 000 et 59 000 ans.

Un père, sa fille et plusieurs cousins

Dans le cadre d’une étude, des chercheurs ont effectué une analyse approfondie de la constitution génétique de onze Néandertaliens (six adultes et cinq enfants) présents dans cette grotte. Les fossiles reposaient tous dans la même couche de sédiments dans la grotte. Ces données ont fourni aux chercheurs la première preuve irréfutable de relations familiales entre ces individus.

Pour rechercher des liens de parenté, les scientifiques ont scanné l’ADN des fossiles à la recherche de minuscules variations. L’ADN de deux d’entre eux (un homme adulte et une adolescente) suggérait une « relation au premier degré ». Autrement dit, il aurait pu s’agir d’un frère et d’une sœur, ou encore d’un père et sa fille. Toutefois, leur ADN mitochondrial (ADNmt), qui est transmis de la mère à l’enfant, était non concordant, ce qui a finalement exclu l’hypothèse d’une relation fraternelle. D’après l’équipe, il s’agirait donc d’un père et sa fille. Le père partageait également de l’ADNmt avec deux autres hommes. Ces derniers étaient probablement des parents maternels proches, comme des cousins.

Les auteurs pensent également que ces Néandertaliens sont tous morts en même temps. En effet, s’ils étaient morts à des moments différents, cela impliquerait que le groupe soit retourné dans la même grotte pendant de nombreuses années pour enterrer chaque membre, ce qui est très improbable.

Par ailleurs, nous savons que ce type de morts simultanées arrivent. En effet, en 2010, une équipe avait notamment rapporté la mort d’une douzaine d’hommes de Neandertal ayant péri ensemble il y a environ 49 000 ans lorsqu’un toit de grotte s’est effondré sur eux. Si les chercheurs n’ont ici découvert aucun signe d’un tel effondrement, ils émettent l’hypothèse que tous ces Néandertaliens seraient morts de faim. Il est effectivement possible que les conditions hivernales aient rendu la chasse impossible pendant un certain temps.

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Famille de Néandertal. Crédits : Field Museum.

Peu de diversité

Aucun des onze Néandertaliens de Chagyrskaya n’a montré de lien génétique avec les Néandertaliens de la grotte Denisova. Cependant, les chercheurs ont découvert un lien avec une troisième grotte à proximité connue sous le nom d’Okladnikov. En comparant la diversité génétique des mâles et des femelles de ces deux populations, ils ont en effet découvert que les chromosomes Y partagés par les mâles étaient assez similaires. En revanche, l’ADN mitochondrial transmis des mères à leurs enfants était très diversifié.

Ce modèle émerge dans de nombreuses sociétés d’hominidés dans lesquelles les hommes ont tendance à rester dans le groupe tandis que les femmes le quittent pour enfanter dans d’autres groupes.

Enfin, cette étude a également révélé une faible diversité génétique entre tous ces individus, ce qui suggère que les Néandertaliens de Sibérie vivaient très probablement en petits groupes de vingt personnes ou moins. Cela signifie également que la population entière de Néandertaliens en Sibérie était très faible (peut-être moins d’un millier).  Les rudes hivers sibériens auraient pu maintenir leur nombre plus bas qu’ailleurs, favorisant peut-être leur extinction il y a environ 40 000 ans.