Une découverte pourrait percer le mystère de l’antimatière

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Illustration d'artiste représentant un noyau d'antimatière antihyperhydrogène-4 créé à partir de la collision de deux noyaux d'or. Crédits : Institut de physique moderne, Chine

L’antimatière, le miroir mystérieux de la matière, intrigue les scientifiques depuis des décennies. Récemment, des chercheurs ont détecté le noyau d’antimatière le plus lourd jamais observé, l’antihyperhydrogène-4, dans un accélérateur de particules. Cette découverte pourrait nous aider à comprendre pourquoi notre Univers est dominé par la matière alors que selon les théories, l’antimatière aurait dû exister en quantités égales après le Big Bang. 

Une véritable énigme cosmique

L’Univers est un endroit rempli de mystères. L’un des plus fascinants concerne l’antimatière. Tout ce qui nous entoure, des étoiles et des planètes à notre propre corps, est composé de matière. Cette dernière est constituée de particules comme les protons, les neutrons et les électrons. Néanmoins, pour chaque particule de matière, il existe une jumelle appelée particule d’antimatière. Ces particules d’antimatière possèdent les mêmes propriétés que leurs équivalents de matière, mais avec des charges opposées. Par exemple, l’électron, qui porte une charge négative, a une jumelle d’antimatière appelée positron qui porte une charge positive.

L’antimatière et la matière sont des miroirs l’une de l’autre, mais lorsqu’elles se rencontrent, elles s’annihilent mutuellement, libérant de l’énergie sous forme de rayonnement. Or, selon nos théories actuelles, il y a environ 13,8 milliards d’années, le Big Bang aurait produit des quantités égales de matière et d’antimatière. Si cela avait été le cas, la matière et l’antimatière auraient donc dû s’annihiler complètement, ne laissant qu’un Univers rempli de lumière. Pourtant, ce n’est pas ce que nous observons. Aujourd’hui, le cosmos semble être presque entièrement composé de matière tandis que l’antimatière est devenue extrêmement rare.

Le grand mystère cosmique est donc de comprendre pourquoi il y a un tel déséquilibre entre la matière et l’antimatière, alors que la théorie suggère qu’il aurait dû y avoir une annihilation symétrique ? C’est une question fondamentale en cosmologie, car elle touche à la nature même de notre existence. Si l’Univers avait été composé uniquement d’énergie, les galaxies, les étoiles et même la vie telle que nous la connaissons n’auraient jamais pu se former.

La récente découverte par des scientifiques du noyau d’antimatière le plus lourd jamais détecté pourrait toutefois offrir de nouvelles pistes pour résoudre ce mystère.

Une découverte cruciale

Les scientifiques ont récemment détecté un noyau d’antimatière appelé antihyperhydrogène-4. Il s’agit d’une particule composée de plusieurs éléments : un antiproton, deux antineutrons et un antihyperon (une particule un peu spéciale qui contient un quark étrange). Ce noyau est le plus lourd jamais trouvé pour une particule d’antimatière.

Pour détecter cette particule, les chercheurs ont utilisé un accélérateur de particules, une machine gigantesque capable de reproduire des conditions semblables à celles qui existaient juste après le Big Bang. Dans le détail, un accélérateur de particules fonctionne un peu comme une immense piste de course : il accélère les noyaux atomiques à des vitesses incroyables avant de les faire entrer en collision. Ces collisions créent des températures et des énergies extrêmes, similaires à celles du début de l’Univers, et permettent aux scientifiques de produire des particules rares, y compris des particules d’antimatière.

Pour cette découverte, les chercheurs ont utilisé le Collisionneur d’Ions Lourds Relativistes (RHIC) du laboratoire national de Brookhaven à New York. Ils ont analysé les traces laissées par les particules après des milliards de collisions et ont pu repérer des signes distinctifs d’antihyperhydrogène-4. C’est un peu comme chercher une aiguille dans une botte de foin, mais avec des outils très sophistiqués qui peuvent voir les plus petites particules de l’Univers.

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Une section du collisionneur. Crédits : Z22/Wikipedia

Pourquoi c’est important

Détecter un noyau d’antimatière aussi lourd est un exploit scientifique majeur susceptible de nous aider à comprendre la composition du cosmos. Plus précisément, les chercheurs étudient si des différences subtiles entre la matière et l’antimatière pourraient expliquer ce déséquilibre. Par exemple, en examinant les propriétés de l’antihyperhydrogène-4, comme sa durée de vie avant désintégration, les scientifiques cherchent à voir si elle diffère de son équivalent en matière. Jusqu’à présent, ils n’ont pas trouvé de différences significatives, ce qui signifie que nos modèles actuels tiennent toujours la route. Cependant, la recherche continue, car même une petite anomalie pourrait changer notre compréhension de l’Univers.

La prochaine étape pour les scientifiques sera de comparer les masses des particules d’antimatière et de leurs homologues de matière. Cette comparaison pourrait révéler des indices sur les raisons pour lesquelles notre Univers est riche en matière, et par extension, pourquoi nous sommes toujours là pour en parler.