D’après une modélisation musculaire 3D, Australopithecus afarensis, l’espèce disparue à laquelle appartient Lucy, pouvait probablement se tenir droite comme les humains modernes. Ces travaux ont également révélé deux autres points très intéressants.
La découverte de Lucy en 1974 par une équipe dirigée par le paléoanthropologue Donald Johanson, dans la région de l’Afar, en Éthiopie, a été une avancée majeure dans le domaine de l’anthropologie. Ce célèbre australopithèque (Australopithecus afarensis) représente en effet l’un des fossiles d’anciens hominidés les plus complets jamais découverts. Les ossements, vieux d’environ 3,2 millions d’années, ont ainsi permis aux scientifiques d’obtenir des informations précieuses sur l’anatomie et le mode de vie de ces créatures considérées comme de proches ancêtres de notre lignée évolutive.
Nous savons notamment que Lucy mesurait environ un mètre de haut et qu’elle pesait entre 13 à 42 kg. Son bassin et ses membres inférieurs indiquent qu’elle pouvait marcher debout, bien qu’elle puisse aussi grimper aux arbres. Pour cette raison, on a longtemps pensé cette espèce se déplaçait un peu à la manière des chimpanzés modernes, se dressant parfois sur deux jambes en se dandinant de gauche à droite. Une étude publiée en 2023 dans la revue Royal Society Open Science nous invite néanmoins à revoir notre copie.
Une reconstruction musculaire apporte des éléments nouveaux
Bien que les tissus mous ne soient pas visibles dans les archives fossiles, les chercheurs peuvent reconstituer ce à quoi ressemblaient les muscles des espèces disparues en utilisant des humains modernes (Homo sapiens) comme modèles. Notre structure osseuse et nos attaches musculaires peuvent en effet indiquer comment les muscles ont été superposés sur le squelette de Lucy. Il s’agit d’un domaine d’étude relativement nouveau qui a notamment récemment permis de comprendre que le T-Rex était plus lent que nous le pensions. Dans le cadre de ces travaux, les chercheurs ont ainsi utilisé une approche de modélisation numérique pour recréer 36 muscles dans chacune des jambes de Lucy.

Une posture droite et des jambes très musclées
Cette reconstruction a montré que l’australopithèque pouvait redresser ses articulations du genou et étendre ses hanches de la même manière que les humains modernes, ce qui suggère que l’espèce pouvait se tenir debout bien droite.
Le modèle a également révélé que les jambes de Lucy étaient beaucoup plus musclées que celles d’un humain moderne et d’une composition similaire à celle d’un bonobo (Pan paniscus). Alors qu’une cuisse humaine est constituée d’environ 50 % de muscle, celle de Lucy en était probablement constituée à près de 75 %. Les jambes de ces créatures étaient aussi moins grasses. Pour mieux visualiser, notez que certains des muscles du mollet et de la cuisse de ces hominidés occupaient deux fois plus d’espace dans ses jambes que dans les jambes humaines d’aujourd’hui.

Enfin, le modèle suggère une plus grande amplitude de mouvement dans l’axe d’extension-flexion des genoux de ces australopithèques que chez l’humain. Combiné à sa masse musculaire, cela suggère que cette espèce pourrait utiliser un large éventail d’habitats, des forêts denses aux savanes herbeuses. Ce type de locomotion n’est par ailleurs observé chez aucun animal moderne.