Découverte d’un « atelier » d’obsidienne vieux d’1,2 million d’années

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Une biface en obsidienne fabriqué il y a 1,2 million d'années. Crédit : Margherita Mussi

Forgée dans le magma, l’obsidienne est sans aucun doute l’un des matériaux les plus durs à travailler. Jusqu’à récemment, nous pensions que ce verre volcanique n’avait été maîtrisé par les humains qu’à la fin de l’âge de pierre. Une découverte en Éthiopie recule toutefois cette échéance de plusieurs dizaines de milliers d’années. Les détails de l’étude sont publiés dans la revue Nature Ecology & Evolution.

Un ancien atelier de bifaces

Une équipe de chercheurs décrit la fouille d’un atelier de bifaces en obsidienne dans une couche de sédiments datée d’il y a 1,2 million d’années sur le site archéologique de Melka Kunture, en Éthiopie. Les scientifiques trouvent cette découverte intéressante pour deux raisons. Tout d’abord, nous pensions jusqu’à présent que la capacité de regrouper de multiples activités de la vie quotidienne uniformément au même endroit ne s’était développée qu’il y a 500 000 ans environ. La séparation des activités ciblées entre différentes localités, qui indique un degré de planification, serait donc visiblement beaucoup plus ancienne.

Par ailleurs, d’une manière générale, l’obsidienne (une roche volcanique vitreuse et riche en silice) n’aurait été largement utilisée qu’à partir du milieu de l’âge de pierre. Or, lors de ces récentes fouilles, 575 des 578 outils découverts sur place étaient sculptés dans de l’obsidienne. La quasi-totalité de ces outils étaient des bifaces très uniformes et standardisés comme il serait possible d’en travailler en atelier.

D’après les auteurs, il s’agirait de la seule « usine » de bifaces jamais datée du Pléistocène inférieur. « Les sites [archéologiques] décrits comme des « ateliers de taille » n’étaient datés que durant la seconde moitié du Pléistocène moyen et uniquement en Europe jusqu’à présent« , écrivent-ils. « Situés principalement en France et au Royaume-Uni, les ateliers de hache de l’âge de pierre les plus remarquables étaient tous associés à la création de lames de silex« .

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Voici à quoi ressemble un morceau d’obsidienne non travaillé. Crédits : PAR~commonswiki

Dextérité et finesse

On ignore encore quelle espèce d’hominidé est à l’origine de ces bifaces. Ce que nous savons en revanche, c’est que ceux qui les ont travaillés « appliquaient avec diligence des retouches secondaires » et étaient très « concentrés sur la régularisation définitive des artefacts« , poursuivent les auteurs.

Atteindre une telle homogénéité aurait demandé des compétences particulières et une bonne dose de dextérité. L’obsidienne est en effet une roche particulièrement fragile qui doit être taillée avec beaucoup plus de finesse que le silex. « En conséquence, les fabricants devaient évaluer avec précision la force du coup pour éviter de produire des éclats peu utiles, ou tout simplement pour éviter de briser le noyau« , expliquent les chercheurs.

La roche est également très coupante. De nos jours, ceux qui la travaillent portent obligatoirement des gants. À l’époque, ils opéraient probablement à mains nues.