Le « cuir » de champignon, une alternative au cuir animal

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Un cuir fabriqué à partir de mycélium. Crédits : Antoni Gandia

Un matériau fabriqué à partir de mycélium se présente comme une alternative moins chère et plus durable aux cuirs animal et synthétique. Pour des chercheurs, la matière  répond également désormais aux attentes fonctionnelles et esthétiques des consommateurs.

Les problèmes du cuir

Les humains produisent du cuir animal depuis des milliers d’années. De nos jours, c’est d’ailleurs l’un des sous-produits les plus lucratifs de l’élevage industriel (environ 40% des profits tirés d’un animal). Depuis quelques décennies en revanche, de nombreuses voix s’élèvent contre la production de cette matière pour des raisons éthiques. Le principe est le suivant : porter du cuir, c’est cautionner et subventionner l’élevage de masse. Et, par association, c’est cautionner les conditions d’élevage de ces établissements et les dommages environnementaux qui leurs sont associées.

En outre, le processus de tannage du cuir provoque des émissions de chrome importantes qui sont dommageables pour l’environnement et la santé humaine.

Depuis plusieurs années, des formes alternatives de cuir ont alors été adoptées. Si ces matières synthétiques permettent de « résoudre » le problème d’éthique animale, leur fabrication implique en revanche également de nombreux produits chimiques toxiques néfastes pour l’environnement. Et si nous avions une autre alternative ?

Du « cuir » de champignon

Une équipe de chercheurs propose en effet de fabriquer davantage de « cuir » à partir de biomasse fongique.

L’idée, concrètement, consiste à s’appuyer sur le mycélium. Il s’agit de l’appareil végétatif des champignons. Celui-ci se compose d’un ensemble de filaments (appelés hyphes) retrouvés généralement dans le sol. Il renvoie au mycélium reproducteur (appelé sporophore) chargé de la production et de la maturation des spores hors de terre. C’est ce sporophore que l’on appelle couramment « champignon ».

Finalement, les petits chapeaux que nous voyons sortir du sol ne sont que la petite partie visible d’un vaste réseau sous-jacent.

Un matériau durable et bon marché

Côté fabrication, le processus consiste à faire pousser le mycélium dans du substrat à base de déchets organiques. Contenu dans un moule, cette matière fongique se densifie alors en un réseau de fibres. À la fin du processus, le produit est séché puis passé au four pour tuer tous les organismes.

Pour les chercheurs, cette matière naturelle pourrait en effet permettre de surmonter les défis éthiques et environnementaux mentionnés ci-dessus.

«En plus d’être plus écologiquement durables à produire que le cuir et ses alternatives synthétiques, car ils ne dépendent pas de l’élevage ou de l’utilisation de ressources fossiles, les substituts de cuir purs à base de biomasse sont également biodégradables à la fin de leur durée de vie, écrivent dans leur article Alexander Bismarck et son équipe (Université de Vienne). Et accessoirement, ils sont aussi bons marché».

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Un cuir fabriqué à partir de mycélium. Crédits : Antoni Gandia

Vers une production industrielle ?

Certaines starts-up, comme l’entreprise MycoWorks (San Francisco) misent sur ce procédé depuis plusieurs années déjà, avec plus ou moins de succès. L’industrie est effectivement encore naissante. Néanmoins, Alexander Bismarck estime que les progrès opérés dans les processus de fabrication permettent au « cuir » dérivé de champignons de répondre désormais aux attentes fonctionnelles et esthétiques des consommateurs.

Faire passer la production de ce cuir fongique à un niveau industriel sera peut-être l’un des derniers obstacles auxquels cette industrie sera confrontée. Mais là encore, il y a du progrès. L’année dernière, une équipe finlandaise a en effet révélé avoir mis au point un nouveau processus industriel capable d’augmenter la production de cuir fongique.