Covid-19 : pourquoi l’indifférence grandit face au nombre de décès ?

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La mort d’une personne peut avoir un effet important sur nos émotions. Toutefois, cet effet n’augmente pas proportionnellement avec le nombre de décès. Pire, l’émotion laisse progressivement place à l’indifférence.

Un phénomène psychologique connu

Très souvent, la mort de nombreuses personnes émeut moins que le décès d’un seul individu (ou de quelques uns). Comme l’explique la BBC dans un article du 1er juillet 2020, la mort d’une multitude de personnes devient une simple statistique. Il s’agit sans doute ici de l’aspect le plus perturbant de la réponse humaine face à la détresse des autres. Comment l’expliquer ?

Ce phénomène psychologique porte un nom : l’engourdissement psychique. Autrement dit, il s’agit de l’idée que plus les gens meurent, moins cela nous touche. Or, cette théorie concerne également le nombre de décès en raison de la Covid-19. Bien que l’actuel bilan soit d’environ 520 000 décès, il est clair que le retour à la vie normale et les autres préoccupations habituelles prennent le pas sur l’émotion et engendrent l’indifférence.

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Crédits : Johns Hopkins University / WHO / SCMP

Interrogé sur la question, Paul Slovic, psychologue à l’Université de l’Oregon (États-Unis) estime qu’une vie est extrêmement importante et précieuse. Malheureusement, ce type de sentiment n’augmente pas proportionnellement avec la hausse des chiffres.

Vouloir se donner bonne conscience

Il y a quelques années, Paul Slovic et son équipe ont mené une série d’études sur cette question. L’objectif ? Démontrer que notre compassion peut s’estomper à mesure que le nombre de décès augmente. Lors d’une expérience, les participants ont reçu deux photos, la première montrant un enfant pauvre et la seconde deux enfants pauvres. Or, les chercheurs ont la plupart du temps observé que les participants étaient prêts à donner plus d’argent à l’enfant seul qu’aux deux autres. Si la logique voudrait que l’on se sente deux fois plus triste et deux fois plus disposé à aider, ce résultat s’explique. En effet, l’individu est l’unité la plus facile à comprendre et à appréhender selon Paul Slovic.

Par ailleurs, une autre phase consistait à montrer des photos du même type avec les statistiques de la région d’origine des enfants. Or, accompagner les photos de telles données a fait chuté les dons de moitié ! Selon Paul Slovic, faire un don dans certaines situations nous ferait nous sentir bien. Toutefois, lorsqu’il est question d’aider un enfant alors que l’on sait qu’il est un parmi tant d’autres dans la même situation, l’effet n’est pas le même.

L’exemple le plus frappant semble être la réaction du monde face à la photo d’Alan Kurdi en 2015. Cet enfant kurde-syrien de trois ans s’est noyé en Méditerranée lorsque sa famille tentait de rejoindre l’Europe pour fuir la guerre. Après la publication du cliché et durant une semaine, les dons envers les ONG et autres associations humanitaires ont explosé. Néanmoins, la guerre en Syrie faisait déjà rage depuis 2011 !